
L’évolution de la population depuis la migration des ancêtres est une discipline intéressante. Elle repose sur ce qu’on appelle la démographie. Les démographes ont recours à de nombreuses méthodes pour expliquer les phénomènes démographiques. Leur démarche consiste notamment à puiser dans les connaissances de disciplines connexes telles la sociologie, l’économie et l’histoire, de manière à ce que l’interprétation soit la plus juste possible. La démographie dépasse largement le cadre de l’analyse statistique et permet d’étudier les phénomènes sociaux dans une perspective globale.
Selon les démographes, entre 1650 et 1905, le taux de croissance naturel est généralement estimé (0.6%) pour les populations d’agriculteurs pratiquant une agriculture sur brûlis, dans les territoires en partie vierge, naturellement régénérés. Ce taux est inférieur par exemple à celui des Vikings quand ils sont arrivés en Islande, dans un milieu a priori moins facile à l’exploitation agricole que Madagascar. Il faut tenir compte aussi qu’entre le XVIIe et le XlXe siècle, l’île importa des esclaves certes, mais qu’une partie de sa population fut aussi exilée et que l’île connût d’importantes épidémies au XlXe siècle.
Si l’on suppose que l’île ait perdu entre les maladies, les guerres qui envoyaient les prisonniers en esclavage, il aurait pu y avoir trois millions et quatre cent milles personnes en 1905, ce qui renverrait alors à un taux d’accroissement de 0,68% par an. Toutes ces estimations de croissance annuelle sont conformes à ce que l’on peut attendre d’une population d’agriculteurs évoluant dans un milieu quasiment vierge. En partant du fait que l’estimation de la population entre 400 000 et 600 000 habitants au milieu du XVlle siècle est recevable pour Madagascar, compte tenu du sérieux des lazaristes et des fourchettes de pourcentages de croissance en accord avec ce qui est régulièrement proposée pour ce type de société , les démographes ont élaboré un modèle démographique estimant la population à différentes époques en postulant une croissance régulière de population essentiellement agricole confrontée à un milieu de savanes et de forêts. Grâce à ce modèle logistique, ils ont tenté d’estimer la population à trois moments cruciaux du peuplement repérés par l’archéologie et des études palynologiques : Le tout début de notre ère avec les premières traces formellement attestées de l’occupation humaine ; le Vllle et le IXe siècle avec les plus anciennes traces d’occupation humaine continue, entre le Xll et le XIIIe siècle avec des vagues austronésiennes. Il apparaît ainsi qu’avec 400 000 à 600 000 sujets en 1650, la population malgache pouvaient compter de 20 à 30 000 personnes au XIIe et Xllle siècle mais que le nombre de sujet en l’an 800 devait être au plus de quelques milliers, et qu’il y a 2000 ans, la population de l’île n’était pas permanente , soit excessivement réduite, soit dispersée et d’un mode de vie totalement différent à celui de l’agriculture, chasseur-cueilleur par exemple avec des inférences démographiques totalement différentes. Par ailleurs, ce type de modèle postule une croissance constante de la population sur le long terme et qu’il ne peut être pris qu’à titre indicatif.

Une population galopante. La croissance entre 1905 et 1941 est une croissance relativement élevée conforme de ce que l’on peut attendre d’une population dans une phase de début de transition démographique. Les mesures de recensement prises par l’administration coloniale étaient naturellement fiscales mais elles se voulaient aussi politiquement populationniste et peut-être philanthropiques grâce à l’amélioration des conditions d’hygiène et de santé. Ces améliorations sanitaires commençaient par la mise en place d’un réseau médical ; la gratuité des soins délivrés par ces services ont été très efficaces pour lutter contre les épidémies. La variole qui cause de gros dégâts en 1904 sera en 1908 considérée comme ayant pratiquement disparu ; des campagnes de vaccination sont organisées par l’Institut Pasteur pour lutter contre la variole ainsi que la rage; Girard et Robic ont vaincu la peste en mettant au point leur vaccin. Des campagnes de lutte contre le paludisme par des injections de quinine, lutte contre les épidémies de grippe, de maladies vénériennes telle la syphilis… Ces mesures constituaient de véritables accalmies pour la population et semblaient se traduire indiscutablement sur les statistiques. Certes en 35 ans, l’accroissement reste faible mais il est assez régulier.
Recueillis par Iss Heridiny