Comme l’a dit un homme de l’art malgache réputé, à la fois enseignant chercheur, le côté humain, mondial, se renouvelle grâce aux réseaux sociaux, aux partages et à l’effet domino. Face à la pression du capitalisme, de plus en plus cynique et hypercalculé, l’homme est devenu son premier rapace. Un bol d’air frais a été apporté depuis quelques semaines par ces centaines de jeunes qui ont réalisé le « challenge de nettoyage » ou « Clean challenge » sur facebook. Le concept est le suivant : un individu, masculin ou féminin, s’invite avec une bêche sur un lieu délabré inondé d’ordures et d’immondices. Il prend une photo de l’« avant », en sandales au milieu des déchets en tout genre. Après un nettoyage en bonne et due forme, il reprend une photo sur le même site. Cette fois, plus d’ordures, tout a été nettoyé et avec le sourire. Cela a débuté par un gars en Europe, et a atteint les cieux malgaches.
Et c’est la jolie Hary Andrianaivo, une jeune femme habitant la commune d’Ivato, très engagée apparemment dans les causes humanitaires. Le look afro, un sourire d’ange et une beauté qui déteint sur les sachets, les amoncellements louches qu’elle va attaquer avec son instrument. A première vue, le challenge est à hauteur d’homme. Le seul besoin, c’est de trouver un tas d’ordures à nettoyer, dans son quartier ou celui d’un ami. Une bêche peut se louer à 1 000 ariary auprès du jardinier du coin. A elle seule, Hary Andrianaivo a accaparé plus de 6 000 « j’aime » et surtout plus de 8 000 partages. Le succès assuré. En fait, ce sont des jeunes du quartier qui se sont regroupés mais Hary Andrianaivo en est devenue le symbole. Parce qu’elle est un bout de femme, en plus d’être jolie, elle effectue un acte qui est souvent réservé aux hommes.
En plus, elle réalise un acte purement citoyen. Sans aucune boursouflure politique ni idéologique, seulement aider son prochain à vivre dans un environnement propre. De Fianarantsoa, à Toamasina en passant par Antananarivo, des dizaines de jeunes ont suivi le mouvement. Et dire qu’à une certaine époque, le simple citoyen qui se met à nettoyer les rues n’était réalisable qu’entre jeunes ou les femmes du parti politique X ou Y. Des actions qui sont en plus surmédiatisées sur les médias pros dirigeants. Quelque part, ce challenge dénote la défaillance de l’Etat et des dirigeants. Puisque le peuple « facebookien » démontre qu’il peut rapidement exécuter des choses qui se décident en réunion, attendent des signatures, des contrats… avant de se faire. Ensuite, quand les ordures s’installent à Antananarivo, les campagnes de nettoyage initiées par les responsables sont souvent citées comme des actes héroïques en prime time. Sans personne pour leur dire que c’est tout bonnement leur travail.
Par exemple, c’est comme si le lancement de la réfection d’un petit nid de poule sur une quelconque route nationale nécessitait un défilé des écoliers de l’EPP local, l’orchestre du gouvernement et la couverture de la CNN. Les adeptes du « Clean Challenge » sont des gens aussi simples mais veulent vivre comme tout le monde. Les malgaches semblent oublier qu’un lieu propre, un quartier propre ne sont pas des exceptions, mais une normalité. Voilà ce qui résumerait l’acte citoyen.
Maminirina Rado