
Les enfants de 0 à 5 ans figurent encore parmi les principales victimes de la malnutrition dans la Grande Ile. En l’absence d’une prise de responsabilité et d’une meilleure coordination des activités, la malnutrition risque d’être encore plus dévastatrice.
A Madagascar, la malnutrition figure encore parmi les premières causes de la mortalité des enfants. La preuve, une récente étude sur le coup de la faim menée par les Nations Unies a montré que 43,% de la mortalité des enfants de 0 à 5 ans sont causés par la malnutrition. L’explication réside dans le fait que les enfants, une fois malnutris, deviennent vulnérables à toutes sortes de maladies classiques, comme la diarrhée, le paludisme, etc. N’ayant pas assez de forces, leurs systèmes immunitaires deviennent vulnérables et de ce fait, ne peuvent pas lutter efficacement contre les maladies qui sont facilement vaincues chez les enfants ayant une alimentation saine et équilibrée, ou une bonne nutrition. Ce qui rend donc vulnérables ces enfants, au point d’en mourir. Or, à titre de rappel, à Madagascar, presque la moitié des enfants de moins de 5 ans, sont encore affectés par la malnutrition chronique. 47,3% pour être exact, selon l’enquête nationale sur le suivi des Objectifs du millénaire (ONSOMD) en 2012. Ainsi, l’insécurité alimentaire atteignant surtout les enfants demeure un problème majeur non moins difficile à résoudre dans le pays. Toutefois, les adultes non plus n’en sont pas épargnés. A ce sujet, l’étude menée récemment par les Nations Unies montre également que huit millions d’adultes malgaches sont atteints des mauvaises conséquences de la malnutrition, leur causant un retard de croissance.
Réduction à 30%. L’Etat malgache à travers l’Office National de la Nutrition (ONN), étant une structure de coordination des activités de lutte contre la malnutrition, met en place plusieurs activités pour lutter contre la malnutrition à Madagascar. Parmi ces activités figurent l’élaboration de la politique nationale de la nutrition, la création du plan national de nutrition, l’identification des partenaires, ainsi que la mobilisation des ressources (recherche de bailleurs de fonds). Sans oublier la mise en place d’un système de suivi de la mise en œuvre des activités, ainsi que la création des campagnes de communication par secteur et par acteur de lutte. Cependant, beaucoup d’efforts sont encore à entreprendre de la part de l’Etat, ainsi que tous les acteurs pouvant être concernés par la lutte contre la malnutrition. Cela, afin de réduire au moins le taux de malnutrition chez les enfants de moins de 5 ans à environ 30%. «Un renforcement des efforts collectifs est indispensable pour que la malnutrition soit vaincue à Madagascar. Mais pour cela, il faut que tout le monde prenne ses responsabilités», argumente le Dr Nick Rasoamiaramanana, responsable de la Prise en charge de la malnutrition auprès de l’ONN. Cependant, le chevauchement des activités est à éviter, comme c’était le cas en 1994. A cette époque, une meilleure coordination des activités était manquante.
Manque de moyens. Outre la coordination des activités des acteurs de lutte ou les partenaires, l’ONN mobilise également près de 6000 sites communautaires. Toutefois, moins de 50% d’entre eux seulement sont fonctionnels, faute de moyens. Ces sites contribuent pourtant à la lutte contre la malnutrition à travers la sensibilisation, et le changement de comportement des mères de famille. Généralement appelés sites UPNNC (Unité de Programme de National de Nutrition Communautaire), ils font partie des branches opérationnelles des bureaux régionaux de l’ONN. Chacun d’eux est géré par un agent communautaire en nutrition (ACN) souvent élu ou désigné par la communauté en raison de sa bonne conduite ou de sa capacité à répondre efficacement aux attentes des mères de famille en matière de santé, d’hygiène, d’art culinaire, et de nutrition. Mais ce n’est toujours pas suffisant pour lutter efficacement contre la malnutrition.

Agir pendant les 1 000 premiers jours de l’enfant. Lutter contre la malnutrition chronique, c’est agir surtout pendant les 1000 premiers jours de l’enfant. «C’est pour briser le cercle vicieux de la malnutrition», souligne Harilalao Razafimandimby, responsable de la Communication pour le changement de comportement auprès de l’ONN. Mais pourquoi ces 1000 premiers jours sont-ils si importants pour la croissance de l’enfant? En effet, selon les explications du Dr Nick Rasoamiaramanana, c’est surtout pendant cette phase de croissance que la malnutrition chronique s’installe chez l’enfant s’il n’obtient pas une meilleure prise en charge nutritionnelle venant de ses parents, en particulier de sa mère. L’absence des apports nutritionnels chez l’enfant durant cette phase entraîne facilement un retard de croissance physique et intellectuelle, conséquence directe de la malnutrition chronique. «La productivité intellectuelle d’une personne atteinte de la malnutrition chronique connaît une réduction de 10% par rapport à celle d’une personne qui a une bonne nutrition», rajoute le Dr Nick R. Et l’enquête sur le coût de la faim menée par les Nations Unies de dire qu’une personne victime de malnutrition chronique connaît une perte de 1,6 année scolaire durant son parcours scolaire.
Renforcement des interventions. Parmi les solutions figure alors le renforcement des interventions spécifiques pour la femme enceinte, tout en lui fournissant une alimentation stable, équilibrée, et multicolore. «La femme enceinte doit également manger assez de sel iodé pour assurer l’acquisition de micronutriments», affirme le Dr Nick R. Aussi, il est indispensable d’augmenter la ration alimentaire de la femme enceinte ou de la femme allaitante, etc. A cela s’ajoute l’allaitement exclusif de l’enfant jusqu’à l’âge de six mois. Mais toutes ses actions ne peuvent être complètes sans les interventions en nutrition sensitive: amélioration de la prise en charge sanitaire, éducationnelle, eau-hygiène-assainissement, et agriculture… Ce qui implique donc le critère de multisectorialité de la lutte contre la malnutrition.
Chiffres clés :
- 43,7% des enfants malgaches de moins de 5 ans sont atteints de la malnutrition chronique (2012).
- 43,9% des décès des enfants de moins de 5 ans sont causés par la malnutrition.
- 8 millions d’adultes malgaches sont atteints des mauvaises conséquences de la malnutrition, donc ils ont un retard de croissance.
- Perte de 1,6 année scolaire pendant le parcours scolaire chez les personnes malnutries.
Cadrage nutritionnel
- Bonne nutrition: Une alimentation variée et équilibrée.
- Dénutrition: Etat pathologique qui est causé par l’insuffisance des apports nutritionnels en regard des dépenses énergétiques de l’organisme.
- Malnutrition: Etat pathologique lié à une déficience ou un excès d’un ou de plusieurs nutriments.
- Malnutrition chronique: Retard de croissance, insuffisance pondérale. C’est un état pathologique qui s’installe tôt chez l’enfant malnutri (de 0 à 2 ans).
Besoins quotidiens en nutrition (macro et micronutriment)
- Protide: 15%
- Lipide: 35%
- Glucide: 55%
Dossier réalisé par Arnaud R.