L’instauration de l’Etat de droit et la mise en place d’une Justice crédible et impartiale dépendent en premier lieu du prochain locataire de Faravohitra.
Si la défense nationale et la politique étrangère constituent traditionnellement les domaines réservés du Président de la République, force est de se demander si la Justice fait également partie de ses pouvoirs propres. L’intérêt de la question porte sur la nomination du prochain ministre de la Justice dans le gouvernement de Kolo Roger. En effet, même si la Constitution dispose que « sur proposition du Premier ministre, il nomme les membres du gouvernement et met fin à leurs fonctions » (article 54 dernier alinéa) », la pratique des institutions reconnaît au Président de la République, un droit de veto dans le choix du ministre de la Défense nationale et de son homologue des Affaires Etrangères. Ce qui n’est pas le cas pour le ministre de la Justice quoique « le Président de la République est le garant de l’indépendance de la Justice » (article 107 alinéa 1er). Il est même le président du Conseil Supérieur de la Magistrature.
Domaine partagé. A en juger, c’est le cas de le dire, par ces dispositions de la Constitution, la Justice apparaît également comme un domaine de compétences privilégié du Président de la République dont le mode de gouvernance repose d’ailleurs sur la mise en place de l’Etat de droit et d’une Justice forte et impartiale. Il ne s’agit pas pour autant d’un domaine réservé – au même titre que la Défense nationale et les Affaires Etrangères – car le Premier ministre dispose lui aussi, de prérogatives constitutionnelles en la matière car il est notamment « chargé de l’exécution des décisions de justice ». C’est dire que la Justice est plutôt un domaine partagé entre les deux Chefs de l’Exécutif. Reste à savoir qui aura le dernier mot dans le choix du futur Garde des Sceaux. Et pour cause, des proches d’Ambohitsorohitra qui estiment répondre au profil sans être forcément issu du sérail de la magistrature, lorgnent sur le poste tandis que le locataire de Mahazoarivo pourrait aussi avoir son poulain.
Instrumentalisation. Fort du double principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs qui est le rempart posé par la Constitution contre l’instrumentalisation de la Justice par l’Exécutif, la magistrature a aussi son mot à dire dans la nomination de son ministre de tutelle. Des noms commencent à circuler notamment au niveau de la Cour Suprême, quoique le corps de la magistrature lui-même soit divisé. En effet, les magistrats de l’ordre administratif souhaitent que le prochain ministre de la Justice sorte pour une fois de leurs rangs et non plus de l’ordre judiciaire tel que cela avait été quasi-systématiquement le cas sous tous les régimes. A l’appui de leur « requête », ils rappellent que contrairement à l’usage, le Président de la République n’avait nommé aucun magistrat de l’ordre administratif dans son quota de 3 membres à la HCC. Ce serait en quelque sorte, une mesure compensatoire si le nouveau ministre de la Justice est issu de l’ordre administratif, …jugent-ils. Pour leur part, des membres du barreau « plaident » pour un des leurs à la Chancellerie, comme cela avait été le cas quelques années auparavant.
R. O