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samedi, septembre 7, 2024
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Mosavy : L’art de destruction massive 

Miharitiana Yolande Rakotonirina, doctorante en anthropologie sociale et culturelle, s’intéresse au mosavy, dans tous ses états.

Le malheur des uns fait le bonheur des autres. La jalousie maladive entraine des personnes à recourir à une pratique injurieuse, le mosavy. Un savoir-faire malfaisant dont le but est de provoquer la maladie, ou pire, de démolir la vie de son prochain.

 Les opinions divergent à propos de la sorcellerie à Madagascar. Un mot que tout le monde connaît, et qui ne se démode pas, bien que les pratiques aient progressé. Ces cinq dernières années, mosavy, un vocable qui n’est plus à chercher dans le raki-bolana raki-pahalalana – encyclopédie malgache – sort à nouveau des bouches des Malgaches aussi bien en ville qu’à la campagne. Des victimes témoignent, « J’étais atteinte d’une maladie étrange. Trois docteurs m’ont soignée. Ils ont établi des diagnostics différents. J’avais le pied gauche gonflé. Une amie m’a conseillée d’aller voir un devin près du quartier. Au début, je me suis dit, ce n’est pas possible… Mais mon pied me faisait tellement mal que finalement je me suis décidée à consulter ce fameux mpanazary », se confie Edmine, une jeune femme de 25 ans, résidant à Boriziny. Ce phénomène se discute à voix basse, dans les couloirs. Le dire ouvertement est une honte au sein de la société soi-disant moderne. Cependant, dans le fond, les Malgaches croient en l’inexplicable ! Par ailleurs, la sorcellerie intéresse les érudits. Miharitiana Yolande Rakotonirina, doctorante en anthropologie, travaille avec son directeur de thèse, le Professeur Malanjaona Rakotomalala sur le sujet. « Selon la définition populaire malgache, est mpamosavy celui qui détruit les réalisations de la société, qui bouleverse intentionnellement l’ordre établi, tout ce que la société a déjà maîtrisé pour sa bonne marche. C’est ce que nous avance Malanjaona Rakotomalala dans sa thèse sur la conception traditionnelle de la maladie (1990). Entre autres, le mpamosavy est capable de rendre à l’état animal une personne : les rumeurs parlent, par exemple, de la transformation du sexe d’un homme en serpent ; tout individu victime de mosavy n’est plus maître de lui et peut se comporter comme un animal », a-t-elle expliqué. En effet, cet art de destruction massive inimaginable a une cause profonde, la pauvreté. Celle-ci gangrène la vie sociétale et fait accidentellement naître des oiseaux de mauvais augure. «… La situation socio-politique, aggravée par une paupérisation sans précédent, plus les rumeurs sur les mpamosavy et le mosavy abondent ; tout se passe comme si le mosavy était (ou devenait ?) un marqueur de désordre social. Dans les années 80, les chrétiens étaient mis en avant, sous les ailes de la confédération œcuménique des Églises malgaches F.F.K.M. (Fiombonan’ny Fiangonana Kristiana Malagasy). A l’époque, en Imerina, plus précisément, autour de Tananarive, les cultes sur les sanctuaires doany, là où on honore les razam-panjakana, « ancêtres nationaux », étaient souterrains, puis, dans les années 90, ils brisèrent le silence… Actuellement, chose insolite, des gens avouent leur passé de mpamosavy ; une femme avoue même qu’elle est encore mpamosavy, qu’elle rend des cultes aux esprits socialement rejetés… et qu’elle est fière de cette coutume ancestrale », ajoute l’anthropologue. De leur part, les tenants traditionnels condamnent tous actes liés à la sorcellerie. D’après eux, ceux-ci ont été désapprouvés depuis l’époque précoloniale. « La plupart du temps, les gens font l’amalgame entre le sorcier et le guérisseur. Le premier est un malfaiteur, voire un charlatan alors que l’autre assure le bien-être des villageois. Les mpamosavy se cachent, alors que les mpanandro, les mpanazary vivent avec les habitants ». 

Iss Heridiny

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