
Il est de ces artistes que seul le parcours peut relater le talent immense, Modeste Rakotomandimby l’accordéoniste fait partie de ces inconnus aux grands cœurs.
Un faciès typiquement malgache, regard pétillant, une mine joviale, Modeste Rakotomandimby est un accordéoniste que la musique malgache a fait de plus discret. Actuellement, il est aux côtés du groupe Gasy Mihanta. Son histoire ferait rêver tout musicien qui débute. « Entre 12 et 14 ans, j’ai commencé à vraiment être attiré par la musique. Mais je ne savais pas encore où mettre mes pieds : chanter, danser… », c’était, se souvient-il, dans les années ‘90.
Plus tard, ses parents ont déménagé à Ambositra ensuite à Antananarivo, en quittant Ihosy leur pays natal. Ces deux villes d’accueil au tout début vont jouer un rôle précieux dans son cheminement artistique. « A Ambositra, j’ai fait la connaissance d’Emanoela, sûrement un vieil homme actuellement, mais il y possède encore son atelier de réparation d’accordéon et reste encore actif. C’est lui qui m’a inculqué les bases de la réparation et des techniques de jeu », rappelle fièrement Modeste Rakotomandimby.
Les vingt ans révolus, l’artiste commence à vraiment verser, s’intéresser devenir joueur d’accordéon. En faire un métier, puisque depuis qu’il a vu Régis Gizavo le germe a germé. D’ailleurs, en 2017, il a pu jouer avec le désormais immortel accordéoniste du sud. « Nous avons déjà effectué des tournées internationales ensemble ». En voyant Régis Gizavo jouer, il est tombé sous le charme, le mot exact qu’il utilise pour parler son amour pour l’accordéon.
« Il y a une sorte de charme, ça se ressent dans le regard, tout le corps, la manière de sourire, tout. Ensuite, cet instrument naturel, qui va directement dans le cœur, il y a un lien direct. D’autant que les malgaches sont des personnes du cœur », fait savoir Modeste Rakotomandimby. Après le légendaire Emanoela, réparateur de génie et véritable institution dans le milieu des accordéonistes malgaches, une autre personne a joué un grand rôle dans le cheminement de ce musicien.
Selon les transmissions orales, de génération en génération, il avait pour ancêtre un artiste complet dénommé Ravaloelatra, connu aussi sous le surnom Ramahatoky. Cet homme aux multiples talents a été décoré, à l’époque de 12 honneurs, traduit par « roa ambin’ny folo voninahitra ». Homme de théâtre, de musique et surtout artiste complet, il lui a transmis le drapeau. « A chaque évènement familial, je sors ce drapeau et je le hisse durant les rassemblements », assure t-il avec fierté.
Un jour, l’ancêtre a annoncé quand toutes les générations étaient présentes, « un de vous sera un jour une personne de talent, un artiste ». Tout le monde se demandait à qui irait cette déclaration à l’époque. Sûrement, le petit Modeste était encore à des années lumières de réaliser son avenir d’accordéoniste. « Mon grand ancêtre Ravaloelatra a beaucoup compté pour moi. Un phare, une bénédiction », concède Modeste Rakotomandimby.
Pour perfectionner son style, il a sillonné les doany de Madagascar. « Il faut se faire à l’idée que cet instrument est très utilisé dans les rituels traditionnels malgaches. Mais il ne faut pas oublier que ce sont également des véritables écoles pour tout accordéoniste, j’ai sillonné tous les doany de l’île pour connaitre le style », rappelle t-il. Et il en a entendu de toutes les sonorités. Il a pu ainsi comprendre des systèmes musicaux extrêmement codifiés, malgré le côté parfois festif ou solennel.
Pour lui, la question est de puiser à la source le style traditionnel malgache. « Connaitre en profondeur, pas du superficiel, pour ne pas faire n’importe quoi », prévient-il. Jaojoby l’a ensuite pris sous son aile, sans oublier Rossy qui a été très attentionné. Avec ces grands noms de la musique malgache, il a acquis de l’expérience. « Je peux vous assurer qu’il y a plus de joueurs d’accordéon que de joueurs de guitare et de kabôsy à Madagascar », conclut-il.
Maminirina Rado