Après une refonte du code minier et pétrolier et quelques amendements apportés par toutes les parties prenantes, ce nouveau cadre réglementaire régissant les deux secteurs stratégiques dans le pays, à savoir, les mines et le pétrole, n’est pas encore adopté. Cependant, cela constitue une priorité des priorités pour Madagascar étant donné qu’il garantit le développement de ces secteurs porteurs. Le député élu dans la région de Fénérive- Est, Mohamad Ahmad, apporte plus d’éclaircissements dans le cadre d’une interview, en tant que Président de la commission des Mines et du Pétrole au niveau de l’Assemblée nationale.
Midi Madagasikara (M.M) : Pouvez-vous expliquer pourquoi ce nouveau code n’est pas encore adopté jusqu’à maintenant?
Mohamad Ahmad (M.A) : Depuis ma prise de fonction à l’Assemblée nationale en 2014, j’ai travaillé d’arrache- pied avec toutes les parties prenantes en vue d’amender le code minier et pétrolier. Au début, il y a eu une volonté politique de l’administration pendant les deux premières années. J’ai relancé à maintes reprises qu’il faut maintenant entamer le processus d’adoption de ce nouveau code minier et pétrolier. Mais je constate qu’il n’y a pas du tout de volonté politique de l’administration surtout avec le ministre chargé des Mines et du Pétrole actuel. Cependant, sans la révision de ce cadre légal, l’informel qui mine le secteur, ne cesse de se développer. Même si des exploitants miniers sont conscients qu’il faut se formaliser, ils ont du mal à faire une régularisation.
M.M : Mais quelle est l’importance de la mise à jour de ce code minier et pétrolier ?
M.A : On observe de nombreuses lacunes sur le code actuel. Ce qui a provoqué, entre autres, le phénomène de Soamahamanina étant donné que les retombées économiques positives et directes pour la population locale, ne se font pas sentir. Nous, de notre côté, nous ne ménageons pas nos efforts afin que celle-ci puisse profiter en premier lieu de tout projet d’exploitation minière, et ensuite, le pays en général. En outre, le système « premier venu, premier servi » inscrit dans ce code est une grosse erreur. Cela ne fait que favoriser la spéculation. Un assainissement du secteur minier s’impose en ce moment avec une remise à jour de tous les permis délivrés. Ensuite, l’administration doit exiger à tout détenteur de permis des cahiers de charge précisant ses activités d’exploitation pendant les cinq premières années. Par ailleurs, le permis environnemental doit être délivré en premier lieu avant de procéder à la délivrance d’un permis d’exploitation. Et les techniciens du ministère en charge de l’Environnement doivent effectuer une visite sur le terrain avec ceux au niveau du département des Mines, pour ce faire, afin d’éviter les conflits au niveau des aires protégées.
M.M : Quid de la refonte du code pétrolier ?
M.A : C’est une importance capitale. Il faut mettre en place une balise car on observe toujours des actes de déstabilisation dans les pays producteurs de pétrole surtout en Afrique. Ce sont des expériences que j’ai constatées de visu lors de ma visite dans des pays africains producteurs de pétrole. Une loi forte infligeant des sanctions très exemplaires à l’encontre des milices s’avère ainsi prioritaire pour éviter l’installation des rebelles. Ce qui permettra d’assurer la sécurité et l’unité nationale. Je reconnais que les efforts entrepris par l’OMNIS (Office des Mines Nationales et des Industries Stratégiques) pour attirer des investisseurs étrangers dans ce secteur stratégique via des « roadshows » à l’extérieur, ont porté leurs fruits. Nombreux sont les investisseurs intéressés. Sans compter le cas de « Tsimiroro », « British Petrolium » s’implante déjà à Madagascar. D’autres ont également manifesté leur intérêt pour les blocs offshores surtout dans le Canal de Mozambique. Mais tout cela nécessite un cadre réglementaire bien clair.
M.M : Et que pensez-vous de la situation de KRAOMA ?
M.A : Je suis de près cette affaire. Le personnel est encore en grève. En fait, on a endetté à fond cette société d’Etat alors qu’il n’y a pas assez de retombées positives sur son exploitation. Une esquisse de privatisation de KRAOMA a été observée par le biais de l’ouverture de son capital. Je conteste formellement cette idée. Je lance ainsi un appel à la nouvelle administration minière de mettre en place des dirigeants compétents à la tête de cette entreprise, puisque le chrome produit est la meilleure qualité dans le monde.
M.M : Enfin, l’adhésion de Madagascar à l’EITI est-elle utile, selon vous ?
M.A : Bien évidemment. Je félicite la réintégration de Madagascar au sein de cette entité. Il faut ainsi poursuivre le processus pour permettre au pays d’atteindre le niveau de progrès satisfaisant lui procurant le statut de « pays conforme » aux normes EITI car la transparence de ces secteurs stratégiques est de mise. Par ailleurs, j’ai participé aux réunions de l’EITI depuis ces trois dernières années au Congo et au Pérou afin de défendre le cas de Madagascar à exploiter le charbon de Sakoa servant à produire de l’énergie. Le pays est maintenant en retard car dans d’autres pays producteurs, ce n’est plus autorisé après tant d’années d’exploitation alors que nous n’avons même pas encore commencé. On doit l’exploiter mais d’une manière dégressive.
Propos recueillis par Navalona R.