Débaptiser une rue au détriment d’un personnage historique, c’est omettre sciemment les héritages de la mémoire collective. Une chose inadmissible, quoique l’on dise.
« Baptiser des infrastructures exige une attention minutieuse. Il faut que toute la population ait approuvé que la personne choisie a réalisé des exploits. Ces braves ne sont pas forcément décédés. Par contre, ils n’exercent plus leurs fonctions. Par exemple, le stade Maître Kira à Toliara. Ce grand joueur est encore vivant, mais à la retraite. Prenons l’exemple des politiciens, les rues, les établissements scolaires, les places publiques ainsi que les bâtiments portent les noms des députés MDRM, des nationalistes qui ont lutté contre la colonisation. Ils n’étaient plus au pouvoir lorsque leurs successeurs ont inauguré ces infrastructures. Donc, comme je l’ai dit, il faut faire très attention, car dans le cas contraire, ce sera une recommandation partisane, voire un culte de la personnalité. La plupart du temps, ce sont ceux qui entourent les dirigeants qui jouent au fou du roi. Ils veulent impressionner leur chef », a fait savoir le docteur spécialiste en histoire politique Alexandre D. Lahiniriko.
Une rue est plus qu’un lieu de souvenir pour les vacanciers. C’est un lieu de mémoire qui retrace le passé d’une localité. Elle rassemble le peuple ! En outre, ces six dernières années, Madagascar est victime d’une pollution esthétique. Les hauts dignitaires semblent atteints d’une manie qui consiste soit en un désir insatiable de gloire, soit de grandeur. Voulant réécrire l’histoire, malheureusement à leur avantage, des stèles et monuments sont construits ici et ailleurs, afin d’attester leur soi-disant beauté et l’utilité des édifications bâties à la grande hâte. Ô combien de doany sont en piteux état ? Au lieu de réhabiliter ces patrimoines en péril, les entourages serviles envers le chef d’État ne cessent de le louer immodérément dans le but de le séduire. Le patron est digne d’être célébré comme un être exceptionnel et mérite d’entrer dans les annales, dans les livres d’histoires. On le mythifie… On lui crée une légende qui devient un outil politique. Chacun veut s’aligner derrière les nationalistes membres de MDRM. L’anthropologue Meja Razanabary le confirme, « C’est humain, je pense. Tout le monde ne peut pas se faire un nom. C’est pour cela qu’on s’efforce de faire des choses pour que la génération future n’oublie jamais son existence… En effet, les politiciens exagèrent, en l’occurrence ceux qui suggèrent des idées fantasques à celui qui est à la tête du pays. Et si ce dernier ne sait pas où mettre les pieds, il va trébucher. Cela pourrait être le début de la fin de son règne. Lorsqu’il ne sera plus au pouvoir, le peuple va détruire sa stèle, par exemple. Souvenons-nous de ce qui s’est passé en Lybie, en Irak ».
Le régime actuel a une volonté de changer le cours de l’histoire. Ce qui n’est pas condamnable. Cependant, la manière paraît trop ostentatoire, et imposante. De ce fait, la pratique peut provoquer la frustration de la population. Du jamais vu en 64 ans d’indépendance !
Iss Heridiny