Ces trois dernières décennies, l’argent se fait rare. Elles sont vendues ou fondues pour donner une autre forme. Ampijôro Malaza, un tenant traditionnel d’Andranofanjava a remarqué que depuis les années 2000, les chefs du village de sa localité utilisaient plus les parures en argent. « Nous ne trouvons plus les jetons sacrés. À présent, nous sommes obligés d’utiliser nos colliers et nos bracelets pour les évènements culturels », a-t-il avancé.
Sous un autre angle, la surexploitation des souterrains en est également la cause, car ces temps-ci, les pièces de monnaie en fer ont remplacé les ornements précieux. En effet, c’est avec les 20 et les 50 ariary que nos compatriotes honorent les aïeux. Un fait qui n’a pas laissé l’anthropologue Tiana Randriafahana de marbre. « Je l’avoue, je suis scientifique. Mais, avant tout, je suis malgache. Nous ne trouvons les volafotsy que dans les grands rites comme le fitampoha, le tsangatsaiñy. Pourtant, chaque famille a au moins un tsangan’olo. En fait, cela désacralise notre coutume », se désole le chercheur malgache…
Par ailleurs, les progressistes ne voient pas les choses dans cette optique. Le philosophe Pierre Andriantsirefesina en fait partie. « Certes, la matière n’est plus disponible. Cependant, la culture vit, elle évolue. Avant, c’était le piastre, au XXème siècle, c’est l’argent, actuellement, ce sont les monnaies en fer. Tout cela n’enlève en rien la sacralité du jôro. La pratique est plus importante. Autrement dit, la tradition ne se limite pas à des objets matériels. Le spirituel est au dessus de tout », tel est son point de vue.
Presque partout sur la Grande Ile, la cérémonie cultuelle a un concept philosophique, vue de l’esprit, idée qu’on se fait d’une chose en la détachant de son objet réel. À part l’alcool, le zébu, le miel, le rameau de hasina, les pièces en argent sont des éléments indispensables dans le rituel, jôro. « Les Malgaches les utilisent pour honorer les ancêtres, car bien avant, les pièces en argent étaient la monnaie d’échange, un objet de valeur. Comme le zébu, c’est un signe d’abondance », a fait savoir la guérisseuse Mahinty Taly.
Selon la tradition, le valeureux métal doit être placé dans une assiette blanche contenant de l’eau propre, et quelques feuilles de manguier ou d’hasiñy…
Iss Heridiny