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samedi, juin 14, 2025
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Plume de F : Effets d’annonce et promesses d’ivrogne : petit traité d’illusion électorale

Il y a des phrases qui brillent comme des feux d’artifice : elles montent vite, font beaucoup de bruit, éblouissent la foule… puis retombent dans un silence de cendres. Ce sont les effets d’annonce, spécialité bien connue de nos saisons électorales, tous climats confondus.

L’effet d’annonce, c’est cet art raffiné de promettre avant d’avoir réfléchi, de proclamer avant d’avoir planifié, de faire rêver sans jamais poser la première pierre. Et pour cause : la pierre n’existe pas encore. Elle est toujours « en cours d’étude ».

À Madagascar, le genre est devenu un style à part entière, une sorte de folklore républicain. Il y a cette fameuse autoroute Tananarive/Tamatave, ou Tamatave/Tananarive, c’est selon, qui n’en finit pas d’être en cours. Ou encore de l’annonce d’une usine d’assemblage de voitures, pour faire rouler le pays vers le futur : quelques mois plus tard, les routes sont toujours aussi cabossées, mais la communication, elle, était lisse comme un tableau PowerPoint.

Il y eut aussi la grande promesse d’électrification totale du pays, « d’ici cinq ans » – un « d’ici » qui semble s’éloigner à chaque discours. À ce rythme, les panneaux solaires auront besoin de bougies pour fonctionner.

Certains se rappellent encore l’engagement solennel pour éradiquer les délestages, pour « transformer les coupures en souvenirs ». C’était poétique. Aujourd’hui, c’est surtout comique – à condition d’avoir chargé son téléphone à temps.

On nous a également vanté un  « Grand Port en eau profonde » ,  « une Silicon Valley malgache », « des TGV du développement », ou encore une cité moderne sortie de terre en un an, comme si le BTP répondait aux lois du miracle. Mais souvent, les seules structures sorties de terre… sont les panneaux d’inauguration.

Le plus remarquable, c’est cette capacité à recycler les mêmes annonces à chaque échéance : une école, un hôpital, une route, un stade. Le tout livré « bientôt », « très bientôt », ou mieux encore : « avant la fin du mandat » — sans préciser lequel.

Alors, faut-il en rire ? Un peu, oui. Mais aussi, sérieusement, en tirer les leçons. Un effet d’annonce, contrairement à un teaser publicitaire, ne garantit jamais la sortie du film. Il arrive même qu’il n’y ait ni caméra, ni décor, ni scénario. Seulement une affiche.

Et pendant ce temps-là, le quotidien persiste. Celui des usagers, des élèves, des patients, des citoyens. Eux ne promettent rien, mais ils attendent tout.

Je n’écris pas ces lignes par cynisme, mais par fidélité à cette idée simple : la parole politique engagée. À plus forte raison quand elle est publique, relayée, amplifiée. Ceux qui la prennent doivent l’honorer. Sinon, mieux vaut se taire.

Les effets d’annonce ne sont pas des erreurs de communication : ce sont des dettes de crédibilité. Et les peuples finissent toujours par réclamer le remboursement.

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