
La défécation à l’air libre, le changement climatique et le manque d’hygiène ont réuni des conditions favorables à la mutation de la souche vaccinale de la poliomyélite qui, devenue virulente, a atteint des enfants non vaccinés. Deux cas de paralysie flasque aiguë ont été dernièrement identifiés à Analalava et à Nosy Varika.
C’est presque une urgence : la poliomyélite, maladie presque en éradication à Madagascar, ne doit pas refaire surface. Avec la survenue de deux cas de paralysie flasque aiguë (PFA) dans le district d’Analalava (région Sofia) en octobre 2014 et dans le district de Nosy Varika (région Vatovavy Fitovinany) en mars 2015, il urge de tuer le fléau dans l’œuf et de bloquer une éventuelle propagation du virus de la poliomyélite. En marge des vastes campagnes biannuelles de vaccination massive contre plusieurs maladies – dont la polio – lors des semaines de la santé et la mère et de l’enfant (SSME), une activité de vaccination supplémentaire contre la polio a déjà été menée en décembre 2014 dans 6 régions du Nord du pays. Dans la mesure où la propagation du virus se faisait sentir dans l’ensemble de la Grande île, le ministère de la Santé publique, avec l’appui des partenaires, dont l’UNICEF, organise une nouvelle campagne de vaccination dans 112 districts. Il s’agira alors d’un second passage pour les districts déjà visités en décembre 2014. Cette nouvelle campagne de vaccination démarrera le 27 avril 2015 et s’achèvera le 1er mai. Une cérémonie de lancement officiel se tiendra à Mananjary.
Schéma. L’objectif mondial est d’éradiquer la polio en 2018. La réapparition de nouveaux cas de PFA dans la Grande Ile ces derniers mois amène le pays à susciter une forte mobilisation, à la hauteur du danger de propagation de la polio. « A Madagascar, la défécation à l’air libre et le manque d’hygiène, auxquels s’ajoute le changement climatique, ont favorisé la mutation du virus initialement issus de souche vaccinale », explique Louis Marius Rakotomanga, chef du service de la vaccination au sein du ministère de la Santé. Le schéma relève en réalité, d’un cercle vicieux qu’il urge de rompre. En effet, le vaccin anti-polio oral (VPO) utilisé à Madagascar comme dans de nombreux pays du monde, renferme des virus atténués, lesquels se retrouvent dans les matières fécales des enfants vaccinés. Des substances qui, normalement devraient emprunter les voies adéquates, à savoir les toilettes et latrines. « Or, l’assainissement défaillant, le manque d’hygiène et la persistance de la défécation à l’air libre dans certaines localités, combinés au changement climatique, ont conduit en l’espace d’environ 4 ans, à la mutation du virus atténué. Devenu virulent, le virus, à la rencontre de l’organisme d’un enfant non vacciné, déclenche une PFA chez celui-ci », poursuit Louis Marius Rakotomanga. Ce virus circulant est ainsi un VDPV (de type 1) ou vaccine-derived poliovirus – virus dérivé de souche vaccinale. En d’autres termes, il s’agit d’un poliovirus ayant génétiquement muté à partir d’une souche contenue dans le VPO. Face à ce phénomène, plus le niveau d’immunité de la population est faible, plus ce virus survit longtemps et a des chances de muter.
Porte-à-porte. L’objectif de la campagne de vaccination contre la polio, débutée en 2014 et qui se poursuit par la présente activité de vaccination supplémentaire, est d’endiguer la circulation du virus dérivé de souche vaccinale, tout en réduisant les risques d’explosion d’une épidémie de nouveau poliovirus. La campagne cible spécifiquement 4, 3 millions d’enfants de moins de 5 ans (de 0 à 59 mois) dans toutes les régions pour le 2e tour. L’objectif est d’en atteindre au moins 95 % lors de l’activité de vaccination supplémentaire. De même, atteindre un taux de couverture vaccinale de 95 % pour les enfants de moins de 1 an, est un objectif majeur. Afin de s’assurer que toutes les cibles soient atteintes, la vaccination sera réalisée en porte-à-porte, en recherchant les enfants non vaccinés. Un budget de 3,5 milliards d’ariary, dont un peu plus d’un million de dollars de l’UNICEF, sera mobilisé pour l’ensemble de cette activité de vaccination supplémentaire contre la polio.
Hanitra R.