Six jours après sa saisine, la Haute Cour Constitutionnelle a émis hier son avis sur le calendrier électoral avancé par la CENI
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Dans son Avis n°01-HCC/AV du 15 février 2023, la Haute Cour Constitutionnelle présidée par Florent Rakotoarisoa ne fait que reprendre l’Avis n°03-HCC/AV du 09 mai 2006 émis par la HCC de Jean-Michel Rajaonarivony. « Une anticipation de 20 jours, ne constitue pas une prorogation du mandat constitutionnellement fixé du Président de la République en exercice et que le délai d’anticipation ne présente pas un caractère excessif (…) », selon l’Avis de la HCC de 2006. Et copié presque textuellement dans l’Avis en date d’hier qui considère que « écourter de 10 jours le mandat du Président en exercice ne constitue pas une mesure disproportionnée et excessive ».
19 novembre – 19 décembre
En 2006, le gouvernement dirigé par Jacques Sylla avait effectivement demandé l’avis de la HCC sur la date de l’élection du président de la République. Laquelle devait se tenir entre le 22 décembre 2006 et le 22 janvier 2007. « Or, cette période coïncide avec la période des cyclones et la saison des pluies, risquant ainsi d’handicaper fortement le déroulement normal des opérations électorales », d’après le gouvernement de l’époque qui proposait alors la date du 03 décembre 2008 pour le premier tour de l’élection présidentielle. La HCC d’émettre l’Avis selon lequel « la fixation de la date au 03 décembre 2006 pour la tenue de l’élection du président de la République ne rentre pas en contradiction avec les dispositions de la Constitution ». Tout en reconnaissant que si l’on se réfère à la Constitution, « la date de l’élection présidentielle devrait ainsi se tenir entre le 19 novembre 2023 et le 19 décembre 2023 »
Saison des pluies
En 2023, la HCC fait sienne cette jurisprudence en reprenant dans son avis d’hier que « la proposition de calendrier pour la tenue de la prochaine élection présidentielle, le 09 novembre 2023 pour le premier tour et le 20 décembre 2023 pour le deuxième tour, n’est pas contraire à la Constitution ». Le juge constitutionnel ou électoral avance également comme motif, la saison des pluies. Sans aller jusqu’à plagier carrément « la théorie des climats » évoquée 17 ans auparavant par son prédécesseur à Ambohidahy, même si les changements climatiques n’étaient pas encore ce qu’ils sont aujourd’hui. En tout cas, en s’en remettant à Ambohidahy, l’actuel président de la CENI connaissait certainement l’Avis émis en 2006 par la HCC dont son épouse était d’ailleurs membre.
Interprétation
On est en droit – au propre comme au figuré -de se poser la question de savoir quand est-ce que la HCC de 2023 s’inspire ou pas de celle de 2006. Quand est-ce que la HCC fait une interprétation stricte de la lettre de la Constitution, en déclarant par exemple, irrecevable la demande du Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat de Droit (HCDDED) en considérant que ce dernier n’a pas qualité pour la saisir, en vertu de l’article 119 de la Constitution qui prévoit que « la Haute Cour Constitutionnelle peut être consultée par tout chef d’Institution et par tout organe des collectivités décentralisées pour donner son avis sur la constitutionnalité de tout projet d’acte ou sur l’interprétation d’une disposition de la présente Constitution ». Et ce, quand bien même l’article 118 reflète l’esprit de la Constitution en disposant expressément qu’ « Un chef d’Institution ou le quart des membres composant l’une des Assemblées parlementaires ou les organes des collectivités territoriales décentralisées ou le Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat de Droit peuvent déférer à la Haute Cour Constitutionnelle, pour contrôle de constitutionnalité, tout texte à valeur législative ou réglementaire ainsi que toutes matières relevant de sa compétence ».
Normes
Dans son avis émis hier, la HCC se base sur l’article 42 de la loi n°2015-020 relative à la Commission Electorale Nationale Indépendante qui prévoit que « dans la mise en œuvre de ses attributions, la CENI est investie (…) d’un pouvoir de saisine des juridictions compétentes ». Quid alors de la hiérarchie des normes qui est à la base d’un Etat de droit et qui veut qu’une norme doit respecter celle de niveau supérieur ? Dans le cas d’espèce, la Constitution est au-dessus de la loi relative à la CENI. Il y va de la tenue d’élections dans les normes pour ne pas dire « manara-penitra ».
R.O