
Décentralisation massive, autonomie, fédéralisme, ces systèmes ont souvent été soulevés par des activistes des zones littorales. La centralisation a duré plus de six décennies, ne serait-il pas dorénavant temps de considérer cette nouvelle organisation ?
Les anciens dirigeants et les directeurs régionaux prônent cette idée. « Changer radicalement le système. Les 65 ans de centralisation n’ont apporté que des crises cycliques », estime le régionaliste Corneille Zarinoro. La déconcentration du pouvoir a effectivement été maintes fois réclamée. Les adeptes de ce concept garantissent qu’il favorise le développement. « Que chaque région gère ses ressources ».
Réaliste ou indécis ! Certains disent ne pas être prêts. Monsieur Tondra, fonctionnaire d’une direction dans la province d’Antsiranana entre 1970 et 1997 affirme, « Il nous faut du temps. Certes, la partie nord est dotée d’un port commercial, de richesses naturelles, et est une destination touristique. Oui, les jeunes sont qualifiés, diplômés et très dynamiques. Mais, sommes-nous préparés ? ». Cet aîné fait allusion aux décideurs hâtifs. De plus, il soutient également « la légende urbaine » qui disait que Philibert Tsiranana et son conseiller Miadana Victor étaient persuadés, à l’époque, que le déséquilibre régional était une évidence. « Il faut attendre plusieurs années pour se détacher entièrement de la capitale ». De ce fait, l’étroite collaboration avec la France s’avère impérative. Seule « la Mère patrie peut tirer les Côtiers vers le haut ». En d’autres termes, cette vision est partagée par les contemporains de la Première République. Pour eux, elle a été concrétisée du temps du Père de l’indépendance. Ils étaient persuadés que le sort d’un pays ou d’une région ne se décidait guère en 72 heures et que pour parvenir à son objectif principal, il fallait avoir de la patience. Le projet doit ainsi s’accomplir d’une manière progressive. Hormis le rassemblement, les petites réunions, ainsi que les soi-disant consultations régionales qui se sont timidement organisées ici et là par une frange élites côtières, aucun dialogue régional digne de ce nom n’a été tenu dans les chefs-lieux de provinces. Pourtant, les résolutions de cette envergure concernent de nombreuses entités, si ce n’est la population toute entière.
Un passé flou
L’incompréhension de l’histoire est également l’une des causes de la lenteur de cette construction identitaire. Évidemment, les murs ne tiendront pas debout avec une base fragile. Sans parler des cérémonies, des rituels célébrées tous les 4 ou 5 ans ne réunissant que les tenants traditionnels ainsi que les intéressés, la culture, censée être un fondement – une épine dorsale des localités – semble omise au profit de collections d’artefacts, un arsenal de savoir mal calqué venant de l’occident. Cela se révèle lors des conférences et des ateliers. Les intervenants méprisent l’ingéniosité de leurs aïeux. On préfère citer des auteurs français et américains que de se souvenir, ne serait-ce que d’une phrase de David Jaomanoro, par exemple. Par une démocratie importée tant exaltée, les structures sociales Tsimihety, Sakalava maroseranana, Boeny, Anjoaty sont dénigrées, l’influence extérieure effrite le fondement. Néanmoins, la fusion n’est pas exclue. Bon nombre de sociétés africaines ont pu parfaitement fusionner modernité et tradition. Le brassage culturel génère des idées originales.
Il convient de faire preuve de circonspection. La diversité est une richesse. La déconcentration ou l’autonomie, peu importe le concept proposé, l’unité est indispensable. En tout cas, l’interrelation entre les régions, sur tous les plans, cristallise une nation unifiée en respectant les valeurs de chaque contrée.
Iss Heridiny.