
Le juge constitutionnel vient d’être saisi pour donner son avis sur l’interprétation de certaines dispositions de la Constitution.
En attendant de découvrir le contenu des projets de révision constitutionnelle à soumettre au vote lors du référendum du 27 mai prochain, deux chefs d’Institution ont saisi hier la Haute Cour Constitutionnelle (HCC), demandant l’avis de celle-ci sur l’interprétation de certaines dispositions de la loi fondamentale. Il s’agit du président de la République Andry Nirina Rajoelina et du président du sénat Rivo Rakotovao. Le premier demande l’avis du juge constitutionnel sur son pouvoir de soumettre directement au peuple le vote d’une loi constitutionnelle par voie référendaire. Tandis que le second sollicite l’avis de la Cour sur l’interprétation des dispositions des articles 104, 161, 162 et 163 de la Constitution. En saisissant la HCC, le président Andry Rajoelina voudrait s’assurer si la loi d’habilitation lui permet de s’arroger des pouvoirs dévolus à l’Assemblée nationale et au Sénat en matière de révision constitutionnelle. En fait, le locataire d’Iavoloha hésite devant une question de procédure prévue par l’alinéa 2 de l’article 162 de la Constitution qui dispose : « Le projet ou proposition de la révision doit être approuvé(e) par les trois quarts des membres de l’Assemblée nationale et du Sénat. » Le juge constitutionnel va donc se prononcer si faute de l’Assemblée nationale, le Sénat peut siéger pour approuver le projet de révision constitutionnelle à soumettre par le président de la République. A rappeler que l’alinéa 4 de l’article 84 de la Constitution prévoit : « Lorsque l’Assemblée nationale ne siège pas, le Sénat ne peut discuter que des questions dont le gouvernement l’a saisi pour avis, à l’exclusion de tout projet législatif. »
« Nécessité jugée impérieuse ». Pour sa part, en évoquant dans sa lettre de saisine l’article 104 de la Constitution, le président du Sénat Rivo Rakotovao voudrait demander l’avis du juge constitutionnel sur les limites du pouvoir de légifération par voie d’ordonnance du président de la République. Cet article 104 de la loi fondamentale prévoit : « Le Parlement, par un vote à la majorité absolue des membres composant chaque Assemblée, peut déléguer son pouvoir de légiférer au président de la République pendant un temps limité et pour un objet déterminé. La délégation de pouvoir autorise le président de la République à prendre, par ordonnance en Conseil des Ministres, des mesures de portée générale sur des matières relevant du domaine de la loi. » La Cour est donc sollicitée à se prononcer si convoquer les électeurs pour un référendum constitutionnel fait encore partie des pouvoirs « spéciaux » accordés au président de la République sur la base de la loi d’habilitation votée à l’Assemblée nationale. Par ailleurs, en soulevant l’article 161 de la loi fondamentale, le président du Sénat voudrait notamment demander l’avis du juge constitutionnel sur ce qui doit être une « nécessité jugée impérieuse » que seul le président de la République est compétent pour apprécier. La suppression du Sénat ou la mise en place des gouvernorats de région peut-elle être considérée comme une nécessité jugée impérieuse ?
Riposte. En attendant l’avis de la Haute Cour Constitutionnelle, les sénateurs qui sont particulièrement visés par le projet de révision constitutionnelle organisent leur riposte. Une conférence de presse sera tenue cet après-midi à Anosikely. Une occasion pour eux de démentir publiquement et formellement les affirmations selon lesquelles la Chambre haute est une Institution budgétivore. Raison qui est d’ailleurs évoquée par le gouvernement pour justifier la suppression de cette Institution qui représente les Collectivités Territoriales Décentralisées selon l’article 81 de la Constitution. En tout cas, on assiste actuellement à une véritable course contre la montre. La HCC doit se prononcer dans les plus brefs délais pour que la campagne électorale du futur référendum, si la date de 27 mai 2019 est maintenue, puisse débuter dans 48h. Wait and see.
R. Eugène