Le traumatisme causé par les quatre années du régime de transition est toujours aussi vif et les Malgaches, malgré toutes les désillusions éprouvées depuis l’avènement de Hery Rajaonarimampinana à la tête de l’Etat, ne sont pas prêts de descendre dans la rue. Ils ne veulent plus vivre ces scènes de pillage et ces charges brutales des forces de l’ordre qui étaient monnaie courante depuis le coup d’Etat de 2009. La population a déjà assez de mal à assurer sa subsistance quotidienne et préfère être stoïque dans l’adversité.
Résignation et sagesse
Nos compatriotes sont dignes d’admiration car ils font preuve de sagesse en ne cédant pas à la tentation de la violence devant toutes les injustices qu’ils subissent tous les jours. Les étrangers qui viennent à Madagascar s’étonnent de cette apparente passivité des Malgaches et considèrent cette attitude comme une démission. Les commentaires sur les réseaux sociaux contredisent cette assertion et permettent de voir la réactivité des uns et des autres. Mais la virulence des propos ne va pas jusqu’à l’appel à la révolte. Des membres de la couche la plus défavorisée de la population, quand on les interroge, détournent pudiquement le regard et avouent leur lassitude devant les errements du pouvoir. Leur réponse est invariable quand on parle de manifestations : ils gardent un souvenir amer des violences vécues sous la transition. Aujourd’hui, ils ne pensent qu’à assurer leur subsistance. Les meneurs des grandes grèves d’antan sont rentrés dans les rangs. Les agitateurs n’ont plus aucune chance d’entraîner les foules. Certains se sont calmés après avoir été récupérés par le pouvoir, d’autres ont été traduits en justice et méditent sur leur sort en prison. La majorité des Malgaches est devenue fataliste et suit le cours des événements, en n’espérant que ceux qui les gouvernent reviennent à de meilleures dispositions. Les réformes promises n’ont jusqu’à présent pas été accomplies, mais comme l’avenir n’est pas écrit, elles pourraient connaître un début d’exécution si ces derniers commençaient à penser au bien de la nation.
Patrice RABE