Entre euphorie et tristesse, l’année 2022 a été animée par des manifestations culturelles, buzz, décès. Statique ou impétueuse, elle a laissé des bons souvenirs lorsque des artistes ont fait le plein au Palais des Sports Mahamasina, pendant que des cicatrices ont été tracées par la fluctuation de la vie.
Le sixième art est un moyen d’expression du corps
Des festivals ont été organisés cette année, notamment Hitraotra dont la caravane a fait presque le tour du pays. D’Iarivo à Antsiranana en passant par l’Ouest, l’évènement intéresse les jeunes. La chorégraphie est toujours considérée comme une expression de joie. Sans vouloir abuser, cette année, les danseurs ont fait montre de beaucoup de courage. L’effet de la pandémie, la paupérisation, la discrimination, la maltraitance des enfants, la colère, tout figurait lors des démonstrations sur les planches. « Danser la peine », comme disait le chorégraphe professionnel, Cerveau Kotoson. Certains artistes ont retrouvé leurs inspirations. Les peintres puisent leurs ressources dans chaque coup de pinceau. Des expositions animent les grandes villes, la capitale en particulier. Les visiteurs sont ébahis et touchés par les illustrations des artistes. Reflétant le quotidien, les toiles décrivent clairement les deux années précédentes, une période ardue qui a éprouvé les citoyens. Les peintres, poussés par leur inspiration aiguë, lancent aussi une perspective. Cela pourrait être un avertissement. Outre la chute de l’économie, les forêts rongées par le feu, les animaux calcinés étaient à la une des journaux de ce dernier semestre. De ce fait, les artistes illustrent un environnement désastreux dans le futur. Madagascar, ce pays paradisiaque se transforme en île désertique, si la population continue de jouer les pyromanes. Alors, les tableaux de peinture sont devenus des écrans projetant le futur proche de la Grande-Ile.
Décès et renaissance
Beaucoup de convaincus ont versé des larmes cette année. Des grosses pointures ont rejoint l’Éternel. Vahombey, Rak Roots, Kelly Rajerison, Dedess, Janga Ratah ne sont plus de ce monde. Ils étaient engagés dans la culture malgache, des militants culturels qui ont laissé leurs œuvres à la future génération, des repères incontestables, et celle-ci va pouvoir suivre leurs pas afin de porter haut le fanion. Comme tout le monde, les artistes connaissent des hauts et des bas. Toujours faut-il dire que la pandémie a violemment ébranlé leur statut ! Entre faillite et dépression, de nombreux chanteurs malgaches ont vu leur popularité tomber. Certains ont disparu de la scène bien avant la Covid-19. Noyés dans le lac du désespoir, ils se sont heureusement remis à la suite de différentes aides ou des déclics. Lalie en est un exemple concret. Après un long périple désastreux, elle a récemment repris le micro. Sa voix n’a pas changé malgré les épreuves qu’elle a endurées pendant plusieurs années ! Ses inconditionnels espèrent qu’elle aille crescendo. Ce dernier trimestre était fructueux pour la Diva.
Les manifestations culturelles ont eu le vent en poupe
Cette année était florissante pour les organisateurs événementiels. Des artistes internationaux ont livré des concerts inédits dans la Grande-Ile. Oboy, Dadju, Orelsan, Youssoupha, Chilla, Grodash, Daddy Nuttea offrent des lives sans précédent ! Une réjouissance par excellence ! Les jeunes criaient en les voyant atterrir à l’aéroport international d’Ivato. Ils sautaient dans tous les sens en suivant du bout des lèvres les paroles de leurs idoles. La pandémie a arraché son sourire à Madagascar. Les tracas sont oubliés, les inquiétudes s’enfuient, la convivialité était au rendez-vous. Effectivement, le Palais des Sports Mahamasina s’est métamorphosé en scène. Les artistes locaux n’étaient pas en reste. Presque chaque trimestre plus de deux artistes et collectifs assurent des spectacles grandioses. Shyn et sa team Makua, Mage 4 avec ses 30 ans de carrière, le chanteur évangélique hors pair Joseph D’Af faisaient le plein. Des organisations couronnées de succès. Une phrase répétée tout au long de l’année. En effet, les festivités ont repris. Elles accèdent à un niveau supérieur. Doniah, Somarôho, Zaza Rap Taiza et autres ont pris de la maturité aussi bien sur le plan logistique que dans le domaine technique. La Grande-ile est ainsi une référence dans la région du Sud-Ouest de l’Océan Indien. La passion s’avère être le moteur de l’ambition. Par ailleurs, la musique malgache dépasse ses frontières par le bais des chanteurs. Invités dans les îles voisines, notamment à La Réunion, l’Ile Maurice, Mayotte et en Europe, ils exportent la culture malgache hors de leur territoire. Pour leur part, la diaspora redore le blason. La célébration du 70e anniversaire de l’association des poètes et écrivains malgaches en Europe signifie l’engagement des membres à faire connaître la langue vivante malgache et sa littérature. En somme, la vie culturelle malgache a oscillé. Entre productivité et crise, l’année 2022 était abracadabrantesque, inoubliable pour les uns, douloureuse pour les autres.
Iss Heridiny