
Il sera difficile de supprimer le Sénat sans le consentement des ¾ des sénateurs, à s’en tenir à l’esprit du récent avis de la HCC.
Le président de la République a encore une fois évoqué devant ses partisans réunis hier au Palais des Sports de Mahamasina son projet de supprimer le Sénat. Un projet qui devait être soumis au vote des malgaches au référendum constitutionnel avorté du 27 mai 2019. Andry Rajoelina a réitéré qu’avec les 42 milliards d’ariary du budget de la Chambre Haute, Madagascar peut construire six universités par an. Mais, depuis l’Avis n°07-HCC/AV du 25 avril 2019 où la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) a précisé que ce référendum doit attendre la mise en place de la nouvelle Assemblée nationale, le projet présidentiel consistant à supprimer le Sénat semble incertain, voire impossible à réaliser. Ayant émis son avis, le juge constitutionnel s’est basé entre autres sur l’article 162 de la Constitution qui dispose en son alinéa 2 : « Le projet ou proposition de révision doit être approuvé (e) par les trois quarts des membres de l’Assemblée nationale et du Sénat ».
Négociation. Autrement dit, le président de la République ne pourra pas ignorer le Sénat s’il veut faire passer son projet de loi constitutionnelle à soumettre à référendum. Pour que ce projet de loi constitutionnelle soit approuvé à Anosikely, il faudra obtenir le vote positif d’au moins 47 sénateurs (3/4). La question qui se pose est la suivante : « Les sénateurs pourront-ils voter un texte qui prévoit la suppression du Sénat avant l’expiration de leur mandat ? » La réponse est certainement « non ». Si « oui », ce sera un suicide. On s’achemine donc vers une impasse totale si le président de la République persistera à supprimer la Chambre Haute dans son projet de révision constitutionnelle. Pour débloquer cette impasse à la fois psychologique, relationnelle et juridique, le président de la République serait obligé de négocier avec les sénateurs. Là où une seconde question se pose : « Avec la tension politique qui existe ces derniers temps entre Iavoloha et Anosikely, cette négociation serait-elle encore possible ? »
Sénateurs désignés. Les 11 sénateurs désignés par l’ancien président de la République Hery Rajaonarimampianina sont également intouchables avant l’expiration du mandat en cours. La haute Cour Constitutionnelle a déjà émis un avis sur cette question face aux polémiques sur la possibilité pour le nouveau président de la République de remplacer les sénateurs désignés par son prédécesseur. Ce remplacement semble logique politiquement, mais il est confronté à un obstacle juridique. Pour bon nombre d’analystes politiques, si le nouveau chef de l’Etat ne voudrait pas négocier, il sera condamné à cohabiter avec ces sénateurs à majorité HVM dont le mandat n’expirera qu’en février 2021.
R. Eugène