
A inscrire au panthéon, dans le livre blanc, au firmament du rock malgache, nous revenons sur le parcours de Doc Holliday, le plus grand groupe de rock malgache. Grand par son héritage et le message encore intact laissé aux rockers montants.
Des textes toujours au premier degré, sans jamais prendre position, des riffs saignants, un blues sans convalescence… Doc Holliday est une comète voguant à jamais à travers les cieux éternels de la musique malgache. Ce rock band est né à Toliara, dans les années 70. Cette ville aux confluences modernes, symposium du traditionnel et du moderne, Ralph la définissait de son vivant : « Toliara était très proche de l’Afrique et de l’Europe grâce à la radio ».
Deux grandes villes se trouvent sur la côte occidentale de Madagascar, Toliara et Mahajanga. Cependant, la première avait la chance de capter les stations radios depuis l’Afrique du Sud, jusque dans toute l’Afrique de l’Est, notamment les chaînes anglophones. Elles diffusaient ainsi, sans ménagement, les nouvelles fraîches des idoles de l’époque : les Beatles, les Rolling Stones, AC/DC… Ces radios diffusaient également les morceaux peu mondialisés, adulés dans leurs pays, dans leurs quartiers, dans leurs rues.
C’est en apprenant la disparition d’un tel musicien, la séparation d’un tel groupe, les prouesses d’un tel artiste que Doc Holliday a forgé son rock. Cependant, tout cela n’aurait pas été possible sans un vase expérimental. Un récipient déjà rempli de préparations, où s’assemblaient tradition musicale, rythmique ancestrale et musiciens naturellement qualifiés : la ville de Toliara. Forts de leurs contacts d’ici et d’ailleurs les deux compères se sont installés à Antananarivo. Il faut rappeler que ce genre de parcours initiatiques, beaucoup d’artistes l’ont vécu.
Certains de leurs parents travaillaient dans les services publics, comme enseignant, docteur… et étaient affectés dans des localités ou des villes où la « malgachéité » était fièrement gardée. Une famille qui possède la possibilité de se connecter avec l’au-delà des mers. Une enfance de transhumance et d’enrichissement de l’humain. Ce mode de vie est fréquent chez les chanteurs ou membres de groupes malgaches de la post-indépendance. A Antananarivo, un ancien compagnon de classe se souvient de l’attitude Dead’s, de Raphl et de leur bande : « Ces gars s’en foutaient ». Dans les cours au lycée, la bande affichait déjà des idées peu conventionnelles.
Phénomènes. Ensuite, la notoriété. Des premières répétitions aux premières scènes, Doc Holliday impressionne. Avec des titres comme « Malahelo aho », une ballade blue rock et surtout une voix à la masculinité crue de Dead’s. Le solo sincère et maladif de Raphl, accompagnant l’entrée à la guitare. Les paroles définissant l’amertume de celui qui se tient sur le quai, « Lasa ianao fa tsy tamana », entonne sans brouillard le refrain. Un morceau qui est resté à jamais dans le patrimoine musical malgache mais aussi dans la mémoire du rock national.
Rares sont, dans la musique urbaine, ceux qui ont réussi à avoir laissé une trace indélébile comme Dead’s et ses acolytes. D’ailleurs, la jeune génération le reconnaît. Yves Jerry Ranaivoson Randriamaromanana, guitariste du groupe El Dino le confirme. « En toute humilité, en tant que contributeur au niveau de la scène rock moderne, je pense que Doc Holliday a beaucoup apporté à l’établissement des fondements du rock à Madagascar. Pour avancer, il faut toujours se référer au travail de nos aînés. Et je pense sincèrement qu’ils ont permis à la génération d’aujourd’hui de se situer artistiquement et alimentent constamment leur volonté de vouloir se surpasser tant au niveau de la créativité qu’au niveau de la technique ».
Maminirina Rado