C’est un discours somme toute classique que le président de la République, Andry Rajoelina, a fait à la tribune de l’ONU lors de cette 77e session de l’Assemblée générale. Il a présenté un bilan exhaustif de l’action de son régime, parlant de ses réalisations. Point n’est besoin de revenir sur les différents points qui ont été développés, mais ils donnent une image idyllique de la situation de la Grande île. Sur place, on a l’impression de voir un pays en perpétuelle agitation. Les grèves et les contestations diverses montrent que le pouvoir a fort à faire pour assurer cette stabilité nécessaire au développement. La paix sociale n’est pour l’instant pas en péril et on sent une certaine tension se développer au sein de tous les secteurs. Les conditions de vie difficiles entraînent une frustration qui s’exprime au grand jour. Les hommes politiques de l’opposition ne se privent pas de parler des failles du pouvoir. Mais même si les remarques faites sont justifiées, elles n’ébranlent pas le système qui est verrouillé. La population continue de subir ces longs délestages qui perturbent le cours de son existence. Elle n’a plus d’autres ressources que d’exprimer sa rancœur sur les réseaux sociaux. Sur sa page Facebook, la Jirama se confond en excuses pour les désagréments causés, mais cela ne peut pas calmer les consommateurs qui ne peuvent que se résigner. Il est vrai que les conditions climatiques actuelles sont un frein à cette production d’électricité qui connaît déjà de multiples défaillances sur le plan technique. Sur un tout autre plan, la question du déroulement des prochaines élections, notamment la présidentielle, continue d’être soulevée par la représentante résidente de l’Union européenne qui insiste sur le suivi du financement des campagnes électorales. Le pouvoir fournit des réponses embarrassées à ce propos, mais on sent qu’il ne pourra pas se défiler sur ce point précis.
Les médias du monde entier continuent de faire leurs gros titres sur l’évolution du conflit russo-ukrainien qui est devenu une opposition frontale entre l’Occident et la Russie. Les pays européens et les Américains soutiennent, autant diplomatiquement que matériellement, une Ukraine qui commence à reconquérir les parties de son territoire sous administration russe. L’armée de Vladimir Poutine a subi de nombreux revers et est très affaiblie. Le maître du Kremlin a décidé de décréter une mobilisation partielle qui touchera les réservistes. Il espère pouvoir mobiliser 300 000 hommes pour reconstituer une force armée capable d’aller de l’avant. Des référendums seront organisés dans les régions qui ont été conquises. À la tribune des Nations Unies, les orateurs des pays occidentaux n’ont pas mâché leurs mots sur la manière dont le président russe veut continuer les opérations spéciales commencées le 24 février dernier. Les analystes se perdent en conjectures à propos de la situation réelle à l’intérieur de la Russie. Ils n’ont fait que constater l’existence de premières manifestations de protestation contre la mobilisation partielle décrétée et les arrestations qui ont suivi, mais ils ne peuvent pas établir de prévisions sur la suite des événements.
L’avenir de la Grande île reste plus que jamais incertain. Les grèves et les contestations qui surgissent, un peu partout, entretiennent un malaise qui ne s’est jamais dissipé depuis la crise de la Covid et le passage des cyclones du début de l’année. C’est une mobilisation de toutes les forces vives qui permettra au pays de remonter doucement la pente. La situation est de plus en plus tendue sur le front intérieur.
Patrice RABE