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jeudi, mai 15, 2025
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Stabilité et climat des affaires : « Madagascar risque de devenir le pays le plus pauvre au monde », selon Freddy Andriamalala

Madagascar est déjà mal positionné dans le classement des pays les plus pauvres du monde. Le pays risque de toucher le fond, si une nouvelle crise politique voulue s’éclate, selon Mamy Freddy Andriamalala, économiste et politologue, professeur de Finances Publiques et de Politiques Publiques au Département Economie de l’Université d’Antananarivo. Interview.

 Midi-Madagascar (MM). Quel est votre aperçu général sur la pauvreté à Madagascar ?

Mamy Freddy ANDRIAMALALA (Freddy)Décrire et analyser la pauvreté nécessitent une méthodologie bien appropriée et adaptée à la réalité du pays en question. La pauvreté peut être appréhendée par différentes approches telles l’approche par le revenu ou la consommation, l’approche par les conditions d’existence et l’approche par le vécu et les trajectoires, etc. Mon analyse plus élaborée sur la pauvreté à Madagascar sera présentée  par les résultats de mes travaux  de recherche intitulée : « Le chemin de la pauvreté et de l’exclusion sociale et les Politiques publiques associées ». Il s’agit d’un ouvrage de trois volumes de plus de 1000 pages qui devrait être publié  d’ici peu. C’est un ouvrage dédié aux pauvres et aux exclus  et à ceux qui cherchent à les comprendre et à les aider  à sortir de leur situation.

MM. Quels sont les motifs qui vous poussent à étudier la pauvreté ?

Freddy. Etant moi-même issu d’une famille paysanne pauvre qui avait vécu plusieurs facettes de la pauvreté, s’intéresser aux problèmes des pauvres est pour moi une vision de l’intérieur du phénomène (voice of poor).  Ainsi, je suis saisi par la morale de suivre l’évolution de ce phénomène qui frappe plus de 7 malgaches sur 10.

MM. Quels sont les facteurs déterminants de la pauvreté à Madagascar ?

Freddy. L’insuffisance des ressources économiques liée notamment à la faiblesse du système productif et la prédominance du système de subsistance, est parmi les principales causes de la pauvreté à Madagascar. Il y a également d’autres facteurs explicatifs tels que la privation ou le sous-approvisionnement dans les domaines de l’existence (emploi, la santé, le logement, etc.), la désintégration des entraides familiales et communautaires  pour réduire la pauvreté en cas de difficultés financières ou matérielles aigües.

MM. Est-ce que l’Etat n’a pas sa part de responsabilité dans la persistance de la pauvreté à Madagascar ?

Freddy. L’échec de la régulation étatique de la pauvreté et le manque de capacité d’une organisation politique à produire des biens et services publics fondamentaux comme la santé, l’éducation, la sécurité, etc., sont parmi les facteurs institutionnels de la persistance de la pauvreté dans des pays pauvres comme Madagascar.  La pauvreté ne cesse d’augmenter à Madagascar malgré les différentes politiques qui ont été mises en œuvre depuis quelques décennies. L’analyse des stratégies internationales et des politiques publiques de lutte contre la pauvreté mises en œuvre à Madagascar m’ont permis de le dire haut et fort. C’est dommage ! Dans notre pays, la pauvreté  est en quelque sorte renforcée et intensifiée par des crises politiques répétitives voulues par certaines élites  et politiciens obligés de patienter à la porte du pouvoir.

MM. Donc la crise politique  devient un frein au développement?

Freddy.  Les chiffres nous indiquent que les effets économiques et sociaux des crises politiques sont néfastes. En effet, durant les trois dernières crises politiques, les taux de croissance économique étaient respectivement négatifs: (-6,3%) en 1991, (-12% ) en 2002 et 0% en 2009. Quant à leurs effets sur la pauvreté,  celles-ci s’amplifiaient fortement : le taux est passé de 69,6% avant la crise (2001) à 80,7% durant la crise de 2002, soit près de 2 millions d’individus devenus de nouveaux pauvres. De plus, le taux de pauvreté était de 63,4% avant la crise (2008) contre 76,5% durant la crise en 2010, soit environ 3 millions de malgaches sont également devenus de nouveaux pauvres. A cet égard, une nouvelle crise politique  va renforcer la présence de la mort dans la population pauvre. Ce sera une mort injuste liée à la recherche des places politiques en dehors du cadre démocratique.  Ce sera une mort silencieuse qui deviendra leur réalité quotidienne.

MM. Quel est votre constat sur les revendications politiques fomentées actuellement par des politiciens ?

Freddy. Mon constat au sujet de la revendication politique  actuelle est clair : on ne peut pas régler les dissensions  politiques entre opposants et tenants du pouvoir sur le dos du peuple et avec son sang en l’incitant de manière séduisante  à faire de «  Rotaka » pour pouvoir mettre en place une nouvelle transition. Les renouvellements des mandats électoraux sont très proches. Ainsi,  accorder plus d’importance sur la stratégie politique et sur la préparation aux prochaines élections démocratiques pour désigner le Président de la République et des Députés est un acte patriotiquement correct pour éviter une nouvelle crise et ses conséquences néfastes sur la vie de la Nation. Pour conclure, si une nouvelle crise  politique fomentée par des politiciens soifs du pouvoir s’éclate, Madagascar pourrait devenir le premier pays  le plus pauvre du monde classé devant les pays africains ravagés par des guerres civiles et des conflits politiques  chroniques comme le Soudan, la Somalie, la République centre Afrique, etc.  Wait and see…

Recueillis par Antsa R.

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