- Publicité -
vendredi, juillet 11, 2025
AccueilEconomieSystème bancaire et financier : Archaïque, inefficace et non-inclusif à Madagascar

Système bancaire et financier : Archaïque, inefficace et non-inclusif à Madagascar

Professeur Mamy Ravelomanana, Agrégé des Universités en Sciences Economiques.
Professeur Mamy Ravelomanana, Agrégé des Universités en Sciences Economiques.

Des faits statistiques illustrent la faible implication du système financier malgache dans l’économie. Une analyse a été faite à ce sujet par le Professeur Mamy Ravelomanana, agrégé des Universités en Sciences Economiques. Selon ses résultats, la robustesse du système financier malgache au pays permet de résister aux crises. Les stress tests simulés par le FMI confirment cette réalité. Toutefois, l’incapacité de ce système archaïque et non-inclusif à pourvoir l’économie en ressources financières condamne Madagascar à rester parmi les pays les plus pauvres. Comme pour le niveau de revenu par tête, les indicateurs de Madagascar en termes de performance du système bancaire et financier le placent en queue de peloton de l’Afrique et du monde.

 

Le système financier joue un rôle central dans le développement car le moteur de la croissance économique est l’accumulation de capital. Cette dernière est rendue effective soit par le biais de l’épargne domestique soit par l’attraction des Investissements Directs Etrangers, d’après les propos du Pr Mamy Ravelomanana : Le système financier est destiné en priorité à pourvoir en ressources financières les entreprises afin que ces dernières puissent investir et créer de la valeur.

Pour les économistes, le système financier joue un rôle bénéfique à la fois sur la croissance et la réduction de la pauvreté. La corrélation positive étroite entre le développement financier et la croissance a été évoquée et vérifiée par les universitaires King et Levine en 1993. En 2001, Jalilian et Kirkpatrick (2001) ont estimé sur un échantillon de 42 pays sur la période 1960-1995 qu’une augmentation de 1% du ratio « actifs des banques commerciales sur le PIB (Produit intérieur brut) » élève le revenu des pauvres de 0.4% dans les pays en développement. Madagascar a donc intérêt à se doter d’une structure financière adéquate.

Les performances du système financier et bancaire sont appréhendées à travers deux types de mesures : des indicateurs d’efficacité (ceux de King et Levine), et des indicateurs de robustesse.

Le système bancaire malgache est indéniablement un système robuste puisque, malgré les difficultés résultant des errements de la période socialiste, seuls deux cas de scandale financier, d’ailleurs de petite ampleur (ceux d’INVESTCO et de BICM) débouchant sur une liquidation sont apparus au cours des années et toutes les Banques ont survécu.

Le faible taux de bancarisation ne facilite pas les investissements, surtout pour les petites et moyennes entreprises.
Le faible taux de bancarisation ne facilite pas les investissements, surtout pour les petites et moyennes entreprises.

Un système obsolète…

En ce qui concerne la finance directe, Madagascar ne dispose pas d’un marché financier digne de ce nom. De toutes les composantes d’un marché, seuls le marché de change et le marché d’obligations (dont un marché primaire d’émission de Bons du Trésor et un marché secondaire de Titres de Créances Négociables -TCN) sont sensés en constituer l’embryon.

Les autres composantes courantes en d’autres lieux en Afrique que sont le marché des matières premières ou un marché d’actions ont fait l’objet d’essais, ou restent au stade d’un balbutiement (Madabourse et Mercantile Exchange of Madagascar).

Quant au marché des produits dérivés, signe de sophistication du système financier, il se trouve à des années-lumière des possibilités actuelles.

En ce qui concerne l’intermédiation financière (ou finance indirecte), l’absence d’un registre public ou privé de crédit (Public/private Credit Registry) capables d’effectuer des rating – faille également relevée par la Banque Mondiale – constitue un handicap considérable.

Le faible taux de bancarisation ne facilite pas les investissements, surtout pour les petites et moyennes entreprises.
Le faible taux de bancarisation ne facilite pas les investissements, surtout pour les petites et moyennes entreprises.

Totalement inefficace …..

Appelé PRIVY par le Professeur Levine, l’importance du crédit dans l’économie dans son ensemble se mesure par le ratio du crédit aux entreprises privées par rapport au PIB. Sur un échantillon de 96 pays classés en 4 catégories « Très riche », « riche », « pauvre », « Très pauvre » la corrélation avec le PIB par habitant est de 70% pour le PRIVY.

L’évolution de l’indicateur, pour Madagascar, est significative de la faiblesse de l’implication du système bancaire dans la création de richesse : 0,09 en 1998, 0,09 en 2005 et 0,12 en 2013. La moyenne de la catégorie « Très Pauvre » se situe en 1993 à 0,13. La comparaison avec d’autres pays confirme cette faiblesse relative.

Il en est de même avec tous les autres indicateurs de King et Levine. L’indicateur appelé « PROFONDEUR », corrélé à 51% avec le PIB, mesure la taille du secteur financier. La PROFONDEUR se présente comme le rapport des liquidités du passif du bilan du système bancaire (la monnaie en circulation plus les dépôts à vue et les passifs porteurs d’intérêts à court terme des institutions financières) par rapport au PIB. Elle est de l’ordre de 0,20 (0,18 en 2005, 0,15 en 2014 et prévu pour 0,26 en 2015) – ce dernier chiffre étant la valeur moyenne de la catégorie « Très Pauvre » dès 1993. Cet indicateur classe Madagascar également parmi les pays les moins performants. La PROFONDEUR “prédit” le futur.

 

L’économie malgache est encore fortement dominée par le secteur informel.
L’économie malgache est encore fortement dominée par le secteur informel.

…et une inclusion financière extrêmement faible

Selon les résultats de l’enquête sur la microfinance effectuée par l’INSTAT (Institut national de la statistique) pour le compte de l’Université en 2015, 35,1% des ménages ont accès à une forme de financement formelle ou informelle. Toutefois la finance informelle reste majoritaire. Le taux de bancarisation des ménages est extrêmement faible 4% ; et 7,4% des ménages sont membres d’une Institution de Microfinance. 6,6% des ménages utilisent le mobile banking.

Pays Accès aux institutions financières  
Années 2011 2014  
Madagascar 5,5 % 5,7 %  
Pays à Faible Revenu 21,1 % 22,3 %  
RDC 3,7 % 10,9 %  
Sénégal 5,8 % 11,9 %  

Le tableau précédent montre le retard de Madagascar en matière d’inclusion financière par rapport aux pays africains selon les dernières données de Global Findex. En 2015, le taux de bancarisation de la République Démocratique du Congo est prévu pour se situer à 6 % alors que pour le Sénégal ce taux atteindrait 15 %.

Suivez nous
409,418FansJ'aime
10,821SuiveursSuivre
1,620AbonnésS'abonner
Articles qui pourraient vous intéresser

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici