
Chasser les tortues radiées en vue d’une consommation ou d’un trafic c’est souiller un tabou pour les tribus Antandroy et Mahafaly.
En effet, « cette espèce faunistique qui fait l’objet d’une identité culturelle de notre région, joue un rôle important dans la vie de notre communauté. Elle fait également partie intégrante de notre histoire. Et notre roi Andriambahoaka, durant son règne, a même ordonné qu’il faille à tout prix les protéger. Ceux qui enfreignent cette règle seront maudits », a expliqué Tsilova, un notable Antandroy, dans le cadre d’un événement spécial sur la tortue radiée, organisé par Turtle Survival Alliance (TSA) Madagascar, samedi dernier au jardin d’Antaninarenina. A titre d’illustration, « quand les tortues baillent souvent ensemble, cela signifie que la pluie va tomber prochainement. Elles contribuent également au développement de l’agriculture et à la reproduction des zébus dans notre région. Elles ont, en même temps, le pouvoir de guérir certaines maladies affectant la population et de lutter contre les ensorcellements. Cependant, depuis la recrudescence du trafic de ces espèces endémiques du pays, les pluies se raréfient. C’est pourquoi, nous sommes convaincus que le trafic est également à l’origine du kere dans le Sud », a-t-il dévoilé.
Force exécutoire. Comme solution, ces notables Antandroy et Mahafaly, qui étaient présents à cet événement, ont réitéré qu’il faudrait restaurer leurs us et coutumes en appliquant le « Dinaben’ny sokake », et ce, en étroite collaboration avec les autorités locales. Ils reconnaissent bien que les trafiquants de tortues sont notamment en provenance des autres tribus puisque pour eux cette espèce n’est pas sacrée. « Toutefois, ils ne peuvent pas les commercialiser sans la complicité des membres de notre communauté. A cet effet, les deux parties seront en même temps sanctionnées. Ils doivent payer chacun jusqu’à 2 millions d’ariary. S’ils n’en ont pas les moyens, leurs familles respectives doivent débourser. Et cette règle communautaire doit être accompagnée d’une force exécutoire. Ce « dinabe » sera appliqué à une dizaine de trafiquants dont deux mineurs qui sont arrêtés et emprisonnés », d’après leurs explications.
Exclus des tombeaux. A part cette sanction financière, ces notables Antandroy et Mahafaly ont également avancé à ce que les originaires de leurs tribus ayant été appréhendés dans les affaires de tortues perdent leur identité et soient, par la suite exclus des tombeaux ancestraux. D’ailleurs, « ceux qui sont impliqués dans les trafics de tortues, ne s’en sortent jamais dans la vie étant donné qu’il s’agit d’une espèce sacrée. Peut-être qu’ils sont rassasiés aujourd’hui, mais demain ils seront Kere», ont-ils clamé. Rappelons que Turtle Survival Madagascar travaille en étroite collaboration avec ces communautés Antandroy et Mahafaly pour protéger cette espèce endémique de Madagascar mais en voie de disparition. Cet organisme vient de bénéficier d’une subvention de l’ordre de 150 000 USD de la part du gouvernement américain pour assurer la survie des tortues saisies suite à une tentative de trafic à l’international, avant leur relâchement dans leur habitat naturel.
Navalona R.