10 août 1991 – 10 août 2021. Trente ans se sont écoulés depuis ce qu’on avait appelé “carnage du 10 août ». Presque plus personne ne parle de cette marche qui a marqué toute une génération. De nombreux acteurs de cet épisode ont disparu. On ne trouve plus d’articles qui relatent les faits. Le souvenir s’est quelque peu estompé dans l’esprit de ceux qui y ont participé et qui sont encore vivants. Pour votre serviteur qui en a assuré le reportage, il reste des images choc où le sang et l’émotion se mêlent.
Trente ans après, le souvenir du 10 août 1991 s’est estompé
C’était au début des années 90. Le pays entrait alors dans une période d’agitation. Vingt ans après le 13 mai 1972, c’était le retour de l’effervescence populaire. La place du 13 mai était le lieu de rendez-vous quotidien des meneurs du “Hery velona Rasalama” haranguant une foule voulant le changement sans vraiment savoir la nature de celui-ci. Le président Ratsiraka qui venait d’être réélu refusait de céder au pouvoir de la rue. Une délégation partie à Iavoloha pour négocier avec ce dernier est revenue bredouille et devant le mécontentement des manifestants du 13 mai, la décision de faire cette marche vers le palais présidentiel a été prise. Le 10 août 1991, un cortège de plusieurs milliers de personnes s’est ébranlé d’Analakely dans une ambiance presque festive. Les barrages de soldats sur le trajet ont cédé devant la marée humaine qu’ils avaient devant eux. C’est à quelques centaines de mètres du palais, dans le périmètre de la zone rouge, que des milices Antandroy ont commencé à utiliser leurs frondes pour repousser cette marée humaine. Les militaires de la garde présidentielle sont venus en renfort. Ils ont commencé à tirer. À partir de là, ce fut la débandade. Des dizaines voire des centaines de personnes ont été tuées, certaines essayant de fuir dans les champs avoisinant ont sauté sur des mines. Les leaders du mouvement comme Albert Zafy, Richard Andriamanjato ou le Général « Voay be » ont reflué comme tout le monde. On ne connaît pas le nombre exact de victimes, les corps de certaines d’entre elles n’ayant jamais été retrouvés.
Patrice RABE