
Après la Seconde Guerre mondiale, les conditions de vie à Antananarivo ont connu un profond bouleversement. Asinome Harimino Elisé, Docteur en histoire contemporaine, Enseignant-Chercheur à l’Université de Tuléar, chercheur associé à l’Institut Ralaimongo d’Histoire et d’Etudes politiques, a apporté des explications concernant cette période.
La violence coloniale est souvent associée à une forme de répression essentiellement politique, ayant pour objectif d’imposer l’ordre colonial sur les populations dominées. Il est important ainsi de mettre en lumière une autre forme de violence, particulièrement celle qui est liée aux crises économiques éprouvées par les populations sous domination coloniale. Cela invite à examiner les conséquences économiques et sociales de la Seconde Guerre mondiale
La situation se résume ainsi en un seul titre « La vie est chère » du journal Fandrosoambaovao, le 27 décembre 1946, pour illustrer les conséquences de la guerre à Madagascar, exacerbée par une conjoncture mondiale ayant entraîné une augmentation des prix. Les bouleversements survenus en France et en Europe ont eu des répercussions sur le coût de la vie, en raison de la destruction des matières premières et de la perturbation des réseaux de transport. Dans ce contexte de perturbations mondiales, l’équilibre économique et social du pays a été profondément affecté par l’augmentation des prix.
Difficultés majeures
Sur le plan économique, le pays a connu une pénurie significative d’articles importés, ce qui a entraîné une détérioration des conditions de vie de la population, tant en milieu rural qu’urbain. Les ménages subissent une diminution de leurs ressources financières à cause des conflits. En conséquence, la baisse du niveau de vie de la population entraîne l’émergence de problèmes sociaux.
De surcroît, les mécanismes de redressement de la colonie, notamment le Plan décennal d’équipement économique et social consigné dans la loi du 30 avril 1946, développés par l’administration coloniale, avaient pour objectif la consolidation des intérêts français, ce qui a aggravé la paupérisation d’une certaine frange de la population malgache. Des témoignages issus des districts voisins de la capitale illustrent la gravité de la situation pendant le régime colonial. Face à une augmentation substantielle du coût de la vie, les habitants des zones rurales rencontrent des difficultés majeures pour répondre à leurs besoins essentiels, ce qui les contraint à se déplacer vers la capitale en quête de meilleures conditions de vie, dans le « grenier urbain ». Cependant, ils sont confrontés aux enjeux complexes de la vie urbaine, notamment le chômage chronique, les problèmes de logement, la malnutrition et l’insalubrité. Les décennies 1940 et 1950 ont été marquées par un phénomène de pauvreté urbaine majeure à Tananarive, frappant non seulement les nouveaux arrivants, mais également les descendants d’esclaves affranchis résidant dans les zones de la plaine de l’Ouest de la ville.
Recueillis par Julien R