Le phénomène “Quatre-mi” remonte avant l’Indépendance même, plus précisément dans les années 40-50. Après la Seconde guerre mondiale, pour des raisons nécessairement économiques, des familles originaires des districts périphériques et des provinces viennent dans l’échiquier urbain de la Capitale, dans l’espoir de trouver un avenir meilleur. Faute de revenus stables, dans leur mode d’insertion urbaine, elles s’installent dans des terrains accidentés ou insalubres, loin de la surveillance du pouvoir public qui se montre inerte et impuissant face à cette situation. Ceux qui ne peuvent pas s’installer sur un terrain public, dans leur démarche d’occupation illicite, construisent des abris de fortune sur les digues ou des sites accidentés. Certains envahissent même le centre-ville la nuit par des petites installations à côté des grands bâtiments, dans ou près du jardin public. Ils forment le groupe de personnes vulnérables appelées “Quatre-mi”. Ce vocable est apparu sous le régime socialiste du président Didier Ratsiraka pour désigner les personnes en situation de pauvreté qui vivent dans les rues.
L’indépendance des anciens Territoires d’Outre-mer ouvre de nouveaux terrains d’action et de nouveaux marchés pour les filiales de bureau d’études d’aménagement urbain et les entreprises de constructions françaises. À Madagascar, l’urbanisation a progressé très rapidement, notamment après la Seconde guerre mondiale. De plus en plus accentuée après l’Indépendance, cette situation interpelle le gouvernement malgache en soutenant une politique urbaine « moderne » avec l’appui de la France. Les services d’aide française sont sollicités, et en contrepartie, des privilèges sont accordés aux entreprises françaises à travers les marchés d’études et les travaux d’urbanisme. Ce qui montre donc que les anciens TOM, comme Madagascar, promettent non seulement de nouveaux marchés en faveur de l’intérêt de la France, mais constituent également un terrain de transmission de savoir-faire sur tous les plans: technique, juridique, architectural.
Par ailleurs, la ville d’Antananarivo hérite des formes issues de l’appareil de commandement politique et économique de la période coloniale. Dans le contexte du nouveau statut d’État indépendant, les bâtiments militaires et administratifs sont transférés aux nouvelles autorités ayant généralement conservé leurs usages et leurs fonctions. Cependant, des nouvelles constructions sont implantées pour répondre à certains besoins spécifiques. Les bâtiments privés religieux, et surtout commerciaux ou industriels sont le plus souvent restés dans les mains de leurs propriétaires et/ou utilisateurs initiaux.
La période de la Ière République malgache est marquée par une politique qui cherche à lier étroitement planification économique et aménagement urbain planifié. C’est-à-dire que l’effort d’urbanisme doit être intégré dans les objectifs de développement économique du pays. En effet, le gouvernement de Tsiranana opte pour la gestion des villes comme une politique systématique de centralisation administrative et financière. La politique en gestion urbaine et en matière de développement territorial est entièrement soumise aux décisions de l’Etat.
Iss Heridiny