Le chocolat artisanal malgache est très apprécié par les touristes étrangers. Disposant du meilleur cacao au monde, Madagascar ne devrait pas importer de chocolat, selon Avotiana Valérie Ravaoharimanana, gérante fondatrice de la chocolaterie artisanale Gourmandise Chocolat. Interview exclusive.
Midi Madagasikara (MM). Quelle est la différence entre un chocolat artisanal et un chocolat industriel ?
Avotiana Ravaoharimanana (AR). La différence concerne d’abord les procédés et le mode de production, mais ce sont également deux marchés différents. Le chocolat artisanal est reconnu pour ses ingrédients 100% naturels, sans additif chimique. Il privilégie les matières premières qui offrent plus de bienfaits pour la santé. C’est pour cela qu’il coûte beaucoup plus cher en Europe, surtout lorsqu’il obtient la certification bio. Bien évidemment, il y a aussi des différences au niveau des goûts. C’est difficile à expliquer, mais il faut les goûter pour comprendre. En bref, le chocolat artisanal présente de nombreuses spécificités. C’est pour cela que la qualité est primordiale, car de nombreux consommateurs malgaches commencent à peine à connaître ce type de chocolat. Il ne faut surtout pas qu’ils soient déçus. Par ailleurs, le cacao de Madagascar est réputé être le meilleur au monde. Il faut valoriser cet atout. C’est dommage de devoir exporter notre cacao à l’état brut, ensuite de voir des Malgaches ramener du chocolat pour leurs proches, lorsqu’ils reviennent de voyages à l’étranger. Nous pouvons et devons produire des produits de meilleure qualité à Madagascar.
MM. Comment vous est venue l’idée de créer une chocolaterie ?
AR. Auparavant, j’étais plutôt dans le secteur du tourisme. J’avais beaucoup de projets en vue, mais compte tenu de la crise sanitaire en 2020, il fallait trouver autre chose. A l’époque, le tourisme ne présentait aucune visibilité sur l’avenir. De ce fait, j’ai suivi une formation sur la confiserie, ensuite sur la chocolaterie, c’est-à-dire la production de la fève à la tablette. J’ai travaillé seule et au départ, ce n’était pas facile. Mais avec le temps, le savoir-faire s’est amélioré, l’équipe a grandi et nous sommes de plus en plus connus par le public.
MM. Comment se présente l’environnement des affaires ?
AR. Un peu difficile surtout lorsqu’on se spécialise dans les produits de luxe, alors que le pouvoir d’achat des consommateurs se dégrade à cause des diverses crises. Il y a également le problème de la qualité de l’énergie électrique qui pèse lourd. Outre les perturbations au niveau de la production, on craint également que les mini-coupures d’électricité causent des dégâts sur nos machines et équipements. Tout cela constitue des risques. Au départ, nous avons opéré dans l’informel, mais ensuite, il a fallu formaliser notre activité pour pouvoir mettre en œuvre le plan de développement que nous avions concocté.
MM. Donc, vous travaillez avec des revendeurs ?
AR. Pour l’instant, nous commercialisons nos produits uniquement en ligne. Plusieurs boutiques et revendeurs de produits artisanaux ont déjà demandé à revendre nos produits, mais il faudrait encore voir certains détails techniques, notamment en ce qui concerne la conservation. Nous tenons vraiment à préserver la qualité. D’ailleurs, nous avons de nombreux témoignages de satisfaction et de nombreuses recommandations sur les réseaux sociaux. C’est très encourageant et nous voulons éviter que ces gens changent d’avis.
MM. Quels sont donc vos objectifs, dans le cadre de cette production de chocolat artisanal ?
AR. En premier lieu, j’aimerais contribuer le plus possible à la création de valeur ajoutée en valorisant le cacao supérieur de Madagascar. Cela permet de créer des emplois et de soutenir notre économie affaiblie. Ensuite, l’objectif est aussi de démontrer aux consommateurs malgaches que si notre cacao est reconnu comme étant le meilleur au monde, notre chocolat peut aussi l’être. Dans cette optique, nous envisageons d’exporter nos produits, mais il y a encore beaucoup de chemin à faire.
Recueillis par Antsa R.