Il est vrai que partout ailleurs la suffisance des bien-pensants d’une capitale s’oppose toujours aux résistances irascibles des intellectuels des provinces, et notre pays ne fait pas exception avec en plus l’argument ethnique qui a la dent dure mais comme on dit il faut laisser le temps au temps. Paris ne s’est pas fait en un jour comme on aime répéter.
Parler de Madagascar depuis la capitale est inopportune dit-on parce que le pays ne s’arrête pas aux confins de Mandroseza. On ne peut pas se borner du point de vue d’un Tananarivien pour généraliser et conclure sur le cas malgache, il est vrai. Cependant, on ne peut ignorer que cette ville englobe toutes les particularités de la grande île et qu’ au-delà de toute généralisation abusive, on peut dire que Madagascar est présente à Antananarivo et même plus, les quatre coins de l’île impactent sur son mode de vie , de pensée. Et si pour marquer leurs différences d’origine certains disent qu’ils ne sont pas merina mais Tananariviens, c’est dire la portée nationale des habitants de cette ville. Ainsi, l’exclusivité ethnicisée dégagée, on peut délayer toute considération tribaliste qui existe, il faut l’avouer, mais provient surtout de ceux qui n’y habitent pas , peut être frustrés de ne pas jouir des « commodités » offertes par cette capitale devenue la tour de garde de notre pays.
Toutes les facettes de toutes les régions façonnent aujourd’hui Antananarivo. Côté culturel , d’abord, particulièrement dans la musique et la danse, même dans les soirées les plus huppées, une fois « l’afindrafindrao » s’est tue , les danses de salon ou autres quadrilles ne font plus recette, place aux rythmes de la côte et aux trémoussements des « fesses » ; dans les tintamarres des campagnes électorales seules les « musiques tropicales » réussissent le racolage des électeurs ; côté politique, les candidats connaissent les bastions qu’il faut conquérir pour avoir des voix , à savoir Ambohipo, 67 hectares sans parler des zones périphériques à forte concentration côtière comme Ivato, Mahitsy… Ces arguments peuvent sembler être futiles mais ils résistent et se développent. En tout cas, Antananarivo voire Analamanga constitue un puzzle dont les pièces proviennent de toutes les bannières si elles existent, encore formant Madagascar. Il n’y a pas à douter que ces « diaspora » servent de faiseurs d’opinions dans leurs différentes régions d’origine. Ainsi il ne faut pas prendre à la lettre des propos comme « nous, les côtiers nous sommes considérés comme des citoyens de secondes zones, tout est pour les merina comme pour la retransmission des matches en direct des Barea, par exemple », ces mots dépassent sûrement leurs pensées puisqu’ ils savent que les habitants d’Anjozorobe sont logés à la même enseigne que ceux de Morondava ou ailleurs. Nonobstant de la classe politique d’origine côtière qui veut que ces régions restent leur chasse gardée et rabâche régulièrement l’antagonisme « côtiers-mérina» ,l’on peut bien penser que la réconciliation nationale n’est qu’une vue de l’esprit créée pour entretenir une situation ,qui, bientôt sera anachronique.
R. Ranarivao