
Un conférence-débat ,sur la promotion de la monnaie électronique, s’est tenu à l’Université d’Antananarivo, le 23 juillet dernier. Un des intervenants, Rado Ratobisaona, PCA du CREM, nous apporte son point de vue. Interview.
Midi Madagascar (MM). La monnaie évolue sans cesse. Pouvez-vous décrire cette évolution, au niveau mondial ?
Rado Ratobisaona (RR). En effet, la monnaie tient aujourd’hui une place centrale dans toute économie. Elle a pour fonction de faciliter les échanges, la thésaurisation et parfois de se couvrir contre les risques. Son évolution a été marquée par l’abandon de la « monnaie marchandise » vers l’utilisation des métaux précieux. Ensuite, par la mise en place de la monnaie fiduciaire dont l’Etat seul détient le pouvoir d’émission. La monnaie a perdu sa valeur intrinsèque et n’a plus qu’une valeur faciale. Dans le temps, la sophistication et l’intensification des échanges, a rendu la monnaie dématérialisée. Cette dématérialisation prend la forme de la monnaie scripturale (billet à ordre, cheque, etc.) pour aboutir à la monnaie numérique, électronique, virtuelle … suite aux progrès techniques et informatiques. En parallèle de la coexistence de ces émissions, les grandes villes du monde utilisent la monnaie locale complémentaire, qui repose sur un ancrage territorial avec une reconnaissance juridique par la commission bancaire et financière respective de chaque pays concerné. Mais finalement, le système de paiement électronique de plus en plus sophistiqué gagne la place principale dans une économie devenue mondialisée. Cette évolution s’est enfin traduite par l’utilisation d’une « monnaie sans frontière » dont l’indicateur d’accès dépend du niveau de l’électrification d’un pays, ainsi que des connaissances techniques avancées.
MM. Comment trouvez-vous le cas de Madagascar, dans l’utilisation de cette monnaie moderne de l’économie mondialisée ?
RR. L’évolution du système de paiement à Madagascar dépend du niveau de la pénétration de l’économie malgache sur l’économie mondiale. Plus précisément, le système de paiement de l’économie locale dépend de la compétitivité de l’économie malgache sur la scène internationale, selon les types de produits et services que nous sommes en mesure d’offrir sur le marché international. Ainsi, la faiblesse du taux de bancarisation, le coût de transaction bancaire reflètent déjà la situation du niveau d’utilisation des moyens de paiement moderne à Madagascar. Nous ne sommes pas en retard, mais nous constatons un accès très restrictif de la population active à ces moyens de paiement moderne. En effet, les résultats escomptés d’une prévision macroéconomique ne sont malheureusement pas au rendez-vous, malgré les efforts menés par les agents économiques.
MM. Quelles suggestions avanceriez-vous pour que l’économie malgache puisse mieux profiter de l’utilisation de la monnaie électronique moderne. ?
RR. Plusieurs défis restent à relever, le chantier est très vaste. D’abord, il faut une amélioration de la qualité des produits et services bancaires proposés sur le marché. Il faut mettre en évidence dans les institutions financières, le fait que les clients soient Rois. Cela nécessite un comportement réactif, rassurant la confiance mutuelle de la part des banques, des assurances et des opérateurs de mobile banking. Pour développer l’utilisation de la monnaie électronique moderne, la disponibilité permanente du réseau internet et de l’électricité, s’impose également, au même titre qu’une bonne couverture du réseau de téléphonie mobile. A part cela, nous avons beaucoup d’efforts à accomplir dans l’éducation civique et citoyenne en matière fiscale et financière. La promotion de la concurrence dans le système bancaire, en matière de produits et services financiers est nécessaire pour améliorer la qualité de l’offre. En outre, comme dans de nombreux pays, il faut la transparence en mettant à la disposition des usagers, les informations complètes et nécessaires sur les conditions d accès et de résiliation des services bancaires. Les coûts des transactions doivent baisser pour accroître leur volume. Certes, la logique impose que les coûts soient proportionnels au pouvoir d’achat actuel des usagers, pour espérer un essor du secteur. Enfin, il faut mettre en place un nouvel instrument de paiement à moindre coût, capable de minimiser la circulation des billets de banque. Cela afin d’écraser l’oligopole actuel pour promouvoir le « cashless » à Madagascar, dans l’objectif de restaurer la sécurité et d’intensifier les échanges, pour l’émergence de Madagascar.
Recueillis par Antsa R.