Chaque 25 juin, des dizaines de milliers de tananariviens et des habitants des périphéries rejoignent les abords du lac Anosy et la Haute ville pour apprécier les feux d’artifices lancés à 19h. Cette année, l’affluence est restée inchangée mais la ferveur moindre.
14h30 environ à Anosy, un vendeur à la sauvette quadrille les arrêts bus alentour. « Ce n’est pas encore le moment. D’ici une heure, les riverains d’Anosizato, Ampitatafika, Fenoarivo vont débarquer. À partir de ce moment, il y aura beaucoup de monde ici », prédit-il. Dimanche 25 juin, les traditionnels feux d’artifice lancés au milieu du lac historique étaient le clou populaire des festivités de l’Indépendance dans la Capitale. Les deux sites stratégiques pour profiter de ce spectacle pyrotechnique sont le bord du lac Anosy et les quartiers limitrophes comme Ampefiloha, Isoraka… Mais aussi ceux de la Haute ville. Même refrain sur les hauteurs de la ville des Mille. Vers 14h30, le service public d’ordre a anticipé l’accroissement du flux et a pris des mesures. Au niveau de la bifurcation donnant sur l’État-Major menant vers le jardin d’Andohalo, la route a été fermée aux véhicules. C’est donc des milliers de Tananariviens et Tananariviennes qui sont montés à pied pour rejoindre les points de vue en hauteur.
À Ambatonakanga, un père de famille mène sa femme et sa fille docilement. Il reste encore une demie heure de montée, la petite troupe vient d’Andohan’i Mandroseza. Le monsieur prend tout cela sur le ton de l’aventure. « Pour rentrer, pas de souci, nous allons tout simplement rentrer ». Des vagues de personnes montent depuis l’école Saint-Joseph non loin de la cathédrale d’Andohalo, au niveau du premier point de vue qui donne une vue en plongée de l’aile et du site de lancement. Jusqu’à la rue passant par le palais du Premier ministre Rainilaiarivony d’Andafiavaratra, cette fois surplombant Antsahatsiroa. Là où dame Marianne vend « composés », «=» et du rhum artisanal arrangé au gingembre, objet de sa fierté. « C’est vers 18h que vous ne pourrez plus faire même deux mètres. Ce sera noir de monde. Cette année, notre clientèle n’a pas été différente de l’année dernière », tente-t-elle de positiver.
Les difficultés financières des ménages se ressentent cependant dans les conversations dérobées ici et là, des dépenses lors des achats de boissons et de victuailles. Pour finir à la célèbre terrasse située au sud en aval du Rova, avec ses bars et ses brochettes fumantes. Des touristes hagards s’étonnent d’y voir autant de Malgaches rassemblés et festifs. Tandis qu’une file s’engouffre dans le portail du Rova de Madagascar. « Ce sont les derniers visiteurs admis, beaucoup viennent de loin, la fermeture a alors été retardée », annonce un responsable sur place. À Analakely, vers 16h, les familles rejoignent le tunnel pour atteindre les bords d’Anosy. « Nous venons d’Ambohimangakely. Nous préférons marcher et laisser le minibus loué par la famille dans un parking », fait savoir un autre père de famille, avec sa fille sur les épaules. Quoi qu’on en dise, la ferveur des Tananariviens se ressent plus pour les fêtes du « 26 juin » par rapport à la Saint Sylvestre et le lundi de Pâques.
Aux portes de la ville basse, les habitants d’Ampefiloha sont habitués à voir chaque année une foule investir les rares espaces verts et l’axe derrière la Bibliothèque Nationale. Les feux d’artifices de cette année ont décidément été moins populaires. « D’habitude, à 18h, il n’y a plus aucune circulation de véhicules. Impossible de rejoindre Anosy, c’est bloqué de monde. C’est le contraire cette année », analyse Fetra, un gérant d’épi-bar local. Et chaque année, les façades de l’hôtel Carlton sont la cible de dizaines de gadgets lasers verts. Comme si tout Antananarivo y lâchait sa frustration de ne pas faire la « guerre des lasers ». Interdits par les autorités pour les risques d’accident et de brûlure de la rétine que ces rayons engendrent. Bizarrement, en l’espace de trois ans, le phénomène se répète. Dix à quinze minutes avant le bouquet final, la masse agglutinée aux abords du lac quittait les lieux. « Vingt minutes c’est amplement suffisant. Retour à la maison pour finir la soirée en séries et en films », lancent des amoureux quelque peu pressés de retrouver la chaleur de leur cocon. Même si cette année, deux bases de lancement, Anosy et Mahamasina, ont pu gâter la capitale. Vers 21h. La vie et la circulation reviennent à la normale à Ampefiloha, Andohalo… Cette année aussi, les drapeaux nationaux ont déserté la majorité des toits des chaumières.
Maminirina Rado