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dimanche, juin 2, 2024
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Filière vanille dans la SAVA : Nette régression du travail des enfants

La vanille malgache est indétrônable, elle est la meilleure au monde.

A l’instar de nombreuses filières économiques du pays, la vanille, en particulier de la SAVA, n’est pas épargnée par le fléau du travail des enfants. Les situations décrites dans les presses malgaches et étrangères ont interpellé le monde entier sur l’importance de mettre fin au fléau. Situations qui ont eu des impacts néfastes sur l’image du pays et de la renommée de la vanille malgache qui est actuellement la meilleure au monde. Des pays et entreprises importateurs de l’or verte de la Grande Île ont d’ailleurs fait la pression auprès des exportateurs et des producteurs de vanille sur l’arrêt impératif  de la pratique. Des efforts menés depuis quelques années commencent à porter leur fruit. Parmi les initiatives figure le projet OIT-SAVABE (Soutenir les Acteurs de la Vanille au Bénéfice des Enfants) lancé en 2018 qui a pour objectif la lutte contre le travail des enfants dans la filière vanille, l’amélioration des conditions de vie des ménages et enfin la réinsertion socio-professionnelle des jeunes de 14 à 17 ans qui ont quitté trop tôt le système scolaire.

« Le travail des enfants dans la filière vanille a fortement diminué dans notre localité. Ce, depuis quelques années ». Propos de Torine, mère de famille et planteuse de vanille de la commune rurale de Belaoko-Lokoho, district d’Andapa, pour résumer la situation du travail des enfants dans la région SAVA. Une avancée particulière compte tenu des effets néfastes qu’ont la pratique sur les victimes d’un côté. Mais également sur la renommée de la vanille malgache qui domine actuellement le marché mondial, de l’autre. Un double enjeu qui a été suffisamment compris par les acteurs qui ont manifesté leur volonté de renverser la vapeur. En effet, les dernières statistiques recueillies dans le cadre d’une étude menée par l’Organisation internationale du travail dans la région en 2011 font état de « 20 .000 enfants travaillant dans le secteur de la vanille ». Les choses changent toutefois selon la population de la région. Ce, depuis la mise en œuvre du projet OIT/SAVABE ou Soutenir les Acteurs de la Vanille au Bénéfice des Enfants. « Les cultivateurs ont eu leur lot de sensibilisation depuis le début de ce projet. Les porte-à-porte tendant à nous informer sur ce qu’il faut savoir concernant le travail des enfants, ce que cela implique et ses méfaits nous ont convaincus de changer d’approche. Avec les appuis en matière de technique de culture améliorée de vanille et de gestion financière des ménages, les parents se concentrent plus sur l’éducation de leurs enfants » note Zefania, planteur de vanille de la commune rurale de Bemanevika, district de Sambava.

La pollinisation des fleurs de vanille nécessite un savoir-faire que les enfants n’ont forcément pas.

Rechute. La note positive change considérablement la donne dans la lutte pour  l’effectivité du respect des droits de l’enfance. Notamment, celle relative à la lutte pour le respect du droit à l’éducation qui mine la jeunesse de cette région du pays riche en produits de rente .

Les avancées obtenues jusqu’ici sont toutefois fragiles. L’attrait de l’argent facile causé par une importante circulation de monnaie, le reflet de la réussite des collecteurs, préparateurs et exportateurs font que l’éducation est minimisée, seul l’argent compte. Un dicton de la région résume d’ailleurs, l’état d’esprit « rendez-vous manam-bola », traduit librement par « l’important c’est de devenir riche qu’il y ait ou pas passage dans le système éducatif ». Le risque de rechute des parents et des enfants est ainsi permanent. Des mesures ont toutefois été prises pour « essayer de limiter pareille situation ». Entrant dans le cadre du projet OIT/SAVABE, les mesures en question correspondent à l’amélioration des conditions de vie des ménages des zones productrices de vanille. Ce, par des formations sur deux principaux thèmes, à savoir : « les bonnes pratiques agricoles et l’éducation financière ». Des vagues de formation ont été initiées dans les communes comme Belaoko-Lokoho et Bemanevika. Les premiers résultats annoncent une tendance positive. L’optimisme serait au rendez-vous si l’on s’en tient aux dires des bénéficiaires « je gère mieux mes trésoreries depuis que j’ai bénéficié de la formation entrant dans le cadre du projet. Mes activités telles que la culture maraîchère et la vente de mokary sont de mieux en mieux gérées. Et cela est plus que positif dans mon foyer ». Des séances de dotation de matériels pour les bénéficiaires seraient également en cours dans l’optique d’asseoir la pérennisation du projet.

Quelques informations pratiques sur OIT/SAVABE

 Région d’intervention : SAVA

 Durée : Deux ans

Nombre des communes d’intervention : 32 communes réparties dans  04 districts

Sambava (10) : Maroambihy, Ambodiampana, Nosiarina, Anjangoveratra, Tanambao-Daoud, Bemanevika, Amboangibe, Andrahanjo, Marojala et Farahalana. Ø

Andapa (09) : Doany, Ambalamanasy II, Marovato, Ankiakabe-Nord, Ambodimanga I, Ambodiangezoka, Tanandava, Andrakata et Belaoko-Lokoho.

Vohémar (04) : Milanoa, Belambo, Ampanefena, Antsirabe-Nord.

Antalaha (09) : Lanjarivo, Antsahanoro, Andampy, Sarahandrano, Antsambalahy, Antombana, Marofinaritra, Ampohibe, Ambalabe. – Nombre de bénéficiaires cibles : 15 .000 ménages.

Bénéficiaires :

  • 15 .000 ménages
  • 450 jeunes de 14 à 17 ans qui ont quitté trop tôt le système scolaire et qui ont besoin de réinsertion socio-professionnelle
Partenaire(s):  

Sustainable Vanilla Initiative (SVI), CRLTE SAVA, Région SAVA, Plateforme Nationale de la Vanille (PNV)

Budget: 4 000 000 USD

Financement : USDOL ou Département Américain du Travail

Un champs de vanille typique de la SAVA où les enfants observent leur parents pour acquérir les connaissances.

Divergents. La question de travail des enfants est toutefois sujet à débat dans la région SAVA. Des observateurs, des fils et filles de la région en question ont leur perception des choses. Pour certains, la présence des enfants dans les champs de vanille s’inscrirait plus dans « une logique de transmission des connaissances » et non dans le sens propre du travail. Comme l’a fait savoir Yssouf Mevazara, vice-président de la plateforme régionale de concertation et de pilotage de la filière vanille : « les parents emmènent leurs enfants dans les champs de vanille pour leur donner les connaissances nécessaires afin de perdurer le savoir-faire en matière de culture de vanille. Cette dernière ayant une place importante dans la société de la région SAVA, les parents cultivateurs jugent qu’il est nécessaire, voire primordial, pour eux de léguer leur savoir à leurs enfants. Et la vanille n’est pas comme les autres produits genre la patate, il faut de la finesse, de la patience et beaucoup de sacrifice pour obtenir ce qui fait la fierté de notre pays ». Propos confirmés Zefania : « les parents enseignent leurs enfants à l’art de la culture de la vanille. Si vous trouvez des enfants dans les champs, c’est dans ce sens. Ils observent et sont guidés par leurs parents sur ce qu’il faut et ce qu’il ne faut pas faire. Ce n’est jamais dans l’esprit de les faire travailler pour gagner de l’argent à la façon occidentale du terme ». Zefania de renchérir, « si les parents n’apprennent pas ce qu’ils savent à leurs enfants, comment ferons-nous dans les années à venir ? Comment sera l’avenir de la filière ? Y aurait-il encore des cultivateurs avec le savoir-faire ancestral qui a fait de la SAVA ce qu’elle est actuellement en matière de culture, collecte et préparation de cet or vert ? ». D’autres parents de la SAVA maintiennent la même position et rejettent l’idée selon laquelle l’on fait travailler les enfants dans les champs de vanille. « Autant parler de travail des enfants, pourquoi ne pas avoir ciblé  les domaines comme la petite mine, les marchands ambulants où l’on voit clairement des enfants travailler pour obtenir de l’argent ou encore le travail domestique ? » s’est interrogé Elda, mère de famille habitant la commune urbaine de Sambava.

Des tables bancs construits par des détenus mineurs de la prison d’Antalaha dans le cadre du projet OIT/SAVABE.

Le travail des enfants fait des milliers, voire des millions de victimes dans la Grande Île. Si le cas de la région SAVA affiche une nette amélioration, l’on se demande ce qui se passe ailleurs et dans les autres secteurs économiques ? Les efforts menés dans le cadre de la lutte contre le travail des enfants via le projet OIT/SAVABE tels que le guide de mise en œuvre du code de conduite des acteurs de la vanille sur la lutte contre le travail des enfants à destination des exportateurs de vanille de Madagascar, la mise en place du « Dinam-paritra » et l’insertion de la dimension travail des enfants dans son  article  45 relatif à l’âge minimum  des enfants admis à l’emploi, l’article 46 relatif aux pires formes de travail des enfants dans la chaîne d’approvisionnement de la vanille et l’article 47 définissant les mesures d’accompagnement pour l’élimination du travail des enfants sont des acquis conséquents dans la lutte. Que ce soit selon la définition occidentale ou la perception locale des termes, la question de travail des enfants mérite une attention particulière. Et en parler le jour de la célébration du  30ème  anniversaire  de la convention des nations unies relative aux droits de l’enfance est la meilleure manifestation.

Dossier réalisé par José Belalahy

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