
La vanille malgache, qui joue un rôle économique important, est actuellement menacée par la vanilline et la concurrence internationale.
Madagascar continue de régner en maître sur le marché mondial de la vanille. Avec une production annuelle moyenne de 6 000 tonnes de vanille verte, soit 1 600 tonnes de vanille préparée, la Grande Île détient encore et toujours le statut de pays mondial de la vanille, puisque à elle seule, elle représente 80% de la production mondiale.
Rassurante
Une situation qui rassure et inquiète à la fois. Elle est tout d’abord rassurante dans la mesure où actuellement, la vanille détient une place importante parmi les produits pourvoyeurs de devises. Les cours de cette matière première ont atteint un niveau record ces dernières années. En juin dernier, la vanille préparée se vendait à 500 USD le kilo. Actuellement, les cours avoisinent les 600 USD le kilo. Quant à la vanille verte, une fois de plus, elle a fait le bonheur des planteurs au cours de la campagne 2018, avec des prix qui ont varié entre 100 000 et 150 000 ariary le kilo. Soit environ 30 à 45 dollars. Selon les analystes, cette situation est appelée à perdurer sur le moyen terme. En effet, malgré les différents problèmes liés notamment à une cueillette précoce en raison de l’insécurité, la qualité de la vanille malgache est encore relativement bonne. Pour rien au monde les opérateurs de la filière n’accepteront une baisse des prix. Du coup, les recettes en devises tirées de la vanille vont encore monter. En 2017, ces recettes ont atteint 456 millions USD et pourront facilement passer à 560 millions USD cette année. Avec ce que cela suppose évidemment de positif en termes de balance commerciale. Le FMI reconnaît d’ailleurs dans son dernier rapport sur Madagascar que « la situation du secteur extérieur est restée favorable, avec une très bonne performance des exportations soutenues par des prix et des volumes élevés de la vanille et des produits miniers ».
Double menace
Mais il n’y a pas que des bonnes choses dans cette situation à priori favorable. De nombreux acteurs de la filière vanille ont déjà tiré la sonnette d’alarme quant au danger que représente cette montée vertigineuse des cours mondiaux. Tout d’abord, il y a ce que les spécialistes appellent la menace organique. Il s’agit en l’occurrence du recours de plus en plus fréquent à la vanilline de synthèse par les industriels de l’arôme. Le clou de girofle permet actuellement de procéder à ce que l’on appelle une reformulation afin de produire de l’arôme. Bien évidemment, cette matière ne pourra jamais égaler la vanille naturelle, mais les industriels la préfèrent en raison de son coût largement plus intéressant. La deuxième menace encore plus importante viendra des pays concurrents. L’Inde, l’Indonésie, la Papouasie–Nouvelle-Guinée et l’Ouganda sont autant de pays qui commencent à se faire un nom sur le marché mondial de la vanille. L’Inde, par exemple, a beaucoup investi au début des années 2000 pour percer sur le marché international. Mais une baisse des cours, qui étaient passés à 40 USD, a vite fait de dissuader ce pays. Cependant, en raison de l’embellie actuelle des prix internationaux, qui approchent donc les 600 USD, ces autres pays producteurs sont en train de revenir sur le marché où les industriels sont en quête d’une stabilité tarifaire. En somme, si les autorités malgaches ne font pas attention, cette double menace provenant de la vanille et de la concurrence internationale pourrait muter en un commencement de la fin pour la filière.
R.Edmond.