
« La Haute Cour Constitutionnelle peut être consultée par tout Chef d’institution et tout organe des collectivités territoriales décentralisées pour donner son avis sur la constitutionnalité de tout projet d’acte, ou sur l’interprétation d’une disposition de la présente Constitution. » A s’en tenir à ces dispositions de l’article 119 de la Constitution, la HCC ne peut pas se saisir d’office pour donner son avis sur une acte quelconque. Or, l’opinion s’impatiente depuis hier de connaître l’avis du juge constitutionnel sur la constitutionnalité du décret (NDLR : dont le contenu reste tenu secret) fixant les attributions des gouverneurs de région. Jusqu’au moment où nous mettons sous presse, aucun chef d’institution ou aucun organe des collectivités territoriales décentralisées n’a demandé l’avis de la plus haute juridiction. En attendant la nouvelle donne sur cette question, force est de constater que la récente nomination des 11 gouverneurs de région divise l’opinion politique nationale. Dans le communiqué relatif au Conseil des Ministres d’avant-hier, on fait savoir que les gouverneurs de région auront les mêmes pouvoirs et les mêmes missions que les anciens chefs de région, et ce conformément aux articles 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 58 59 et 60 de la loi n°2014-020 relative aux ressources des Collectivités territoriales décentralisées, aux modalités d’élections, ainsi qu’à l’organisation, au fonctionnement et aux attributions de leurs organes.
Double saisine. Le président de la République et le gouvernement ne sont pas à leur premier essai. Au mois d’avril de cette année, le chef de l’Etat a pris en Conseil des Ministres le décret n°2019-790 « portant convocation des électeurs pour l’adoption du projet de loi constitutionnelle modifiant certaines dispositions de la Constitution de la Quatrième République ». Suite à l’adoption de cet acte règlementaire, la Haute Cour Constitutionnelle a fait l’objet d’une double saisine. La première a été faite par le président de la République lui-même qui, à travers la lettre n°30/04/PRM/AIN/2019 du 24 avril 2019, a demandé l’avis du juge constitutionnel sur le pouvoir du président de la République, de soumettre directement au peuple le vote d’une loi constitutionnelle par voie référendaire. Tandis que la seconde saisine a été effectuée par le président du Sénat qui, par le biais de la lettre n°028-19/Sénat/PS du 23 avril 2019, a sollicité l’avis de la HCC sur l’interprétation des dispositions constitutionnelles, notamment les articles 104, 161, 162 et 163. Dans son avis n°07-HCC/AV du 25 avril 2019, la Haute Cour Constitutionnelle estime que, le président de la République n’a pas le pouvoir de soumettre directement au peuple le vote d’une loi constitutionnelle par voie référendaire. Devant cet avis, l’Exécutif qui avait eu l’intention de jumeler un référendum constitutionnel avec les Législatives prévues le 27 mai 2019, a fait volte-face en annulant le décret de convocation des électeurs pris le 19 avril. Actuellement, le pouvoir en place qui veut selon ses dires, booster le développement harmonieux et équilibré des 22 régions de Madagascar, revient sur son projet de mise en place des gouvernorats de région. Mais à la différence de la première tentative, l’Exécutif veut le faire sans passer par la révision de la Constitution.
R. Eugène