Il est certes amusant de jouer sur les noms des lieux. Tuléar devient Toulouse ; Antsirabe devient Bira ; Mahajanga devient Jangil etc, mais cela relève plutôt du snobisme voire de la mode et ne prête guère à de conséquences graves. Toucher à des noms de quartiers, de villes historiques risque d’effacer de la mémoire collective le passé d’un lieu, pièce de puzzle de la Grande Histoire. Analakely l’est parce qu’autrefois il y avait un petit bois par là. Il en est de même pour tous les « patronymes » des localités de toutes les villes du pays. Malheureusement, les receveurs de bus ne l’entendent pas ainsi et s’acharnent par paresse ou par commodité de travestir le passé. « Misy miala ao amin’ny Omby vavy mikavina » ? Savez-vous où est ce lieu ? Non, bien sûr tellement il le rabâche à longueur de journée que le nom originel est tombé à jamais dans les oubliettes. Le panneau publicitaire de la « Vache qui rit » ne nous apprend rien de la genèse de ce lieu se trouvant quelque part entre l’hôtel Ibis et Ivandry. A croire que ces messieurs émargent auprès de quelques grands maîtres du marketing. La liste est longue, amusez vous à retrouver les vrais noms des quartiers et transmettez-les à vos proches, ils en seront ébahis. Même les chauffeurs de taxi censés être plus avertis de l’instruction que les aide-chauffeurs perdent comme on dit le nord. Dernière épisode qui frise le ridicule, mais aussi de faire perdre la constitutionnalité de ces nouveaux sénateurs. Même tout le ghota intellectuel se mêle les pinceaux quand il parle de « Palais d’Anosikely », Anosikely relève de la pure invention des receveurs, ce lieu n’existe pas. Oui, pour différencier l’arrêt d’Anosibe de celui d’Anosy tout court, ils ont baptisé là où se trouve le « Palais du Sénat », Anosikely. Voilà qu’ils deviennent des faiseurs d’opinions en minorant la Chambre Haute, sans arrière politique, bien sûr. Un conseil pour les futurs candidats à un poste électif en quête de notoriété, glissez quelques billets à des receveurs et ils hurleront votre nom en lieu et place des circonscriptions stratégiques et les résultats seront, soyez en sûr, positifs. Il fut un temps où chauffeurs de bus et leurs auxiliaires devaient suivre une formation, obligation jugée dénuée de sens selon eux, au point de mettre les cravates par-dessus des pulls à col roulé. Il n’y a pas de lien entre la toponymie (étude des noms) et la cravate direz- vous ? Cependant vous conviendrez qu’il n’y a pas de petites et de grandes valeurs, car elles se joignent toujours quelque part.
M.Ranarivao
