
Le blocage de routes tend à devenir un moyen de contestation, qui provoque parfois des échauffourées et des dérapages à cause des barrages érigés par les manifestants contre ceci ou pour cela. A l’exemple des étudiants de l’Ecole Polytechnique de Vontovorona qui ont exprimé leur ras le bol par rapport au délestage. Ils ont érigé des barrages de pierres sur la route des joueurs et supporters des Barea, après le match contre la Guinée équatoriale. Face à la non-reprise des cours, des étudiants de l’Université de Toliara étaient également sortis quelques jours auparavant du campus de Maninday pour se rendre à une quinzaine de kilomètres de l’entrée de la Ville. Ils ont brûlé des pneus et érigé des barrages de branches d’arbre pour bloquer la circulation sur la RN7. Obligeant ainsi les passagers se rendant dans la Cité du Soleil à faire des transbordements. Portant ou traînant leurs bagages avec eux sous un soleil de plomb.
Unité nationale. Les éléments de la Force d’Intervention de la Police (FIP) basés à Toliara se sont rendus sur les lieux pour dégager le passage, à coups de grenades lacrymogènes. Dispersant alors les manifestants dont l’un a tenu un discours allant à l’encontre du processus de réconciliation nationale, voire de l’unité nationale. « Vous n’avez pas à vous rendre à Toliara comme nous n’allons pas non plus nous rendre à Tana », a-t-il lancé, au micro d’une station de télé privée, à l’endroit des passagers supposés en provenance de la capitale. Ce genre de dérapage verbal n’est pas pour servir l’instauration d’un climat d’apaisement à trois semaines du premier tour de l’élection présidentielle que les « anti-7 novembre » veulent torpiller à tout prix. Au propre comme au figuré.
Barrage macabre. Ce n’est pas la première fois que des manifestants bloquent la RN7. Début juillet 2016, une foule en furie avait mis en place un barrage macabre en se servant du corps d’un jeune homme tué dans une rixe à Andohatapenaka. Et ce, pour exprimer leur mécontentement suite à la décision du parquet de Tana d’accorder la liberté provisoire à une quinzaine d’individus présumés être impliqués dans la bagarre qui a coûté la vie à la victime.
Victimes collatérales. Le 18 août 2018 dans la Région Menabe, c’est-à-dire toujours dans le Sud du pays, le maire de Bekopaka avait bloqué l’accès des touristes aux Tsingy de Bemaraha pour réclamer le versement dans les caisses de sa commune de 50% des prix d’entrée sur le site. Un mois et une dizaine de jours après, des paysans avaient bloqué à leur tour la RN35 pour manifester leur colère face au faible débit d’eau dans le barrage de Dabara, qui est vital pour l’irrigation de leurs rizières. La manifestation a dégénéré avec pour victimes collatérales les usagers de cette route nationale, dont les véhicules ont été caillassés, paraît-il, par des éléments incontrôlés, pour ne pas dire infiltrés.
Ordre public. S’ils ont le plus souvent pour objectif de tirer la sonnette d’alarme, ces barrages n’en sont pas moins contraires à la loi fondamentale qui dispose en son article 10 que « les libertés d’opinion et d’expression, de communication, de presse, d’association, de conscience et de religion sont garanties à tous et ne peuvent être limitées que par le respect des libertés et des droits d’autrui, et par l’impératif de sauvegarde de l’ordre public, de la dignité nationale et de la sécurité de l’Etat ».
Devoir. Ils constituent également une entrave à la libre circulation des biens et des personnes prévue par l’article 12 alinéa 2 de la Constitution qui édicte « Tout individu a le droit de circuler et de s’établir librement sur tout le territoire de la République dans le respect des droits d’autrui et des prescriptions de la loi ». L’article 16 d’ajouter que « Dans l’exercice des droits et libertés reconnus par la présente Constitution, tout individu est tenu au devoir de respect de la Constitution, des Institutions, des lois et règlements de la République ».
Précepte. L’article 33 de la Constitution de disposer en son article 33 alinéa 1er que « le droit de grève est reconnu sans qu’il puisse être porté préjudice à la continuité du service public ni aux intérêts fondamentaux de la Nation ». En somme, pour reprendre une expression qui est à la fois un précepte et un proverbe, « la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres ». Etant tous soumis aux impératifs d’ordre public et de sécurité de l’Etat. C’est valable pour les politiciens qui sont des citoyens à part entière et non pas entièrement à part.
R. O